Après l'échec du passage en Espagne par la vallée des Aldudes, on décide de prendre une route un peu plus large et adaptée au véhicule, alors direction St Jean-pied-de-port. pour franchir le célèbre col de Roncevaux.
La petite ville de St-Jean-pied-de-port est surprenante et l'ambiance entre mercantilisme et spiritualité des plus particulières, mais la rue de la citadelle reste charmante. On ne reste cependant pas très longtemps, juste le temps d'acheter une petite balayette pour nettoyer notre van poussiéreux et nous partons pour l'Espagne qui commence à se faire désirer ...
On quitte la France sous la pluie et à peine la frontière franchie, le soleil pointe le bout de son nez. On fait une pause à Roncevaux et joie, bonheur, plaisir des yeux, l'endroit est merveilleux ... La petite crypte de la collégiale de Santa Maria est magnifique et le lieu empreint d'une spiritualité austère. Notre début de ce côté-ci de la frontière est fort réussi. La suite ne sera pas décevante...
On traverse quatre vallées espagnoles : les montages sont douces et verdoyantes, l'eau des rivières est cristalline et il y a des géraniums accrochés sous toutes les fenêtres de chaque maison de chaque petit village ... On fait une pause dans l'un deux à Ochagavia, histoire de tester notre faible lexique espagnol autour d'une "cerveza" bien méritée. On décide de finir cette traversée dans un petit camping perdu au cœur d'une forêt de la vallée de Roncal (le besoin de douche se fait sentir ...). Un petit moment seul au monde dans ce camping qui se faufile au sommet de la montagne et se fond dans la nature et un réveil avec les vautours comme horizon ! La vie est simple dans les montagnes de Navarre.
On se laisse guider au hasard des petites routes sans manquer de faire une pause dans chacun des petit village de la vallée, ce qui nous permet de prendre notre petit déjeuner dans une boulangerie comme on en fait plus : un four, une planche de bois, des grosses miches de pain, de la farine partout partout et une sorte de brioche au chocolat qui semble nous attendre. C'est simple mais efficace, en voilà une journée qui commence bien.
A l'office de tourisme de Roncal, on entend parler de Lumbier et de sa fosse : une profonde faille dans la montagne où se prélassent de nombreux vautours, on entre donc en Navarre orientale pour voir cela de plus près. On commence notre balade sur un plateau ensoleillé avant de plonger dans les gorges du rio Irati accueillis par des dizaines de volatiles. La fosse est spectaculaire tout comme la proximité avec nos voisins à plumes. Je les soupçonne cependant d'avoir tenté de subtiliser nos sandwichs lors de la pause pique-nique sur le pont du diable (et évidemment ma phobie pour les animaux volants n'a rien à voir dans ces accusations gratuites).
On poursuit notre exploration de la mystérieuse Navarre orientale, après ses paysages envoûtants, place à la culture. Terre de châteaux (comme le surprenant castillo de Ravier, littéralement posé au milieu de nulle part) et de monastères, la Navarre est une porte d'entrée vers l'histoire de l'Espagne: de la conquête des maures à la Reconquista. Ainsi, c'est avec plaisir qu'on décide de se perdre dans les dédales du monastères de Leyre et avec un plus grand plaisir encore qu'on savoure la liqueur produite par les moines au coucher de soleil en profitant de la sublime vue depuis les derniers contreforts de la sierra de Leyre sur le lac de Yesa. Le panorama est magnifique et la bâtisse des plus impressionnantes. Le fait que la visite s'effectue seul, en possession d'un grand trousseau de clefs rajoute un côté magique à la découverte de chaque nouvelle salle. On retient son souffle après avoir poussé et ouvert avec plus ou moins de difficulté les lourdes portes de bois du monastère. La journée se finit sur les rives du lac Yesa en compagnie de familles espagnoles venues profiter comme nous de la beauté des lieux.
Tim et moi ne sommes pas des spécialistes de l'escalade, pour être honnête je souffre d'un vertige assez costaud qui me fait rentrer dans la catégorie des gens qui poussent des cris hystériques à la moindre vue du vide, mais bon, le bonhomme aime les sports de nature et il a entendu parler de drôles de roches rouges, dressées vers le ciel, en plein milieu de la campagne espagnole qui servent de terrain de jeux à des grimpeurs venus du monde entier. La frontière avec la province de l'Aragon est tout près alors pourquoi pas; partons tutoyer les sommets des mallos de Riglos.
Comme vous vous en doutez, la simple vue d'un baudrier me mettant en état d’apoplexie cérébrale, il n'est pas vraiment question qu'on escalade ces gentils cailloux mais par contre je ne dis jamais non à une petite randonnée, on s'arrête donc dans une petite "panetteria" pour faire le plein de sandwichs et on part se frotter "au chemin du ciel" qui traverse les mallos. La suite n'est que vues spectaculaires et grandeurs de la nature. Il n'y a rien à dire de plus, juste être là et se sentir immensément petit et intensément vivant !
Le temps d'une bière au pied de ses géants cramoisis, on tente d'étirer le temps en profitant une dernière fois de la vue. Cette plongée en Navarre et en Aragon est terminée, enfin presque on ne résiste pas à une pause baignade dans les piscines naturellement turquoises d'une petite rivière qu'on gardera secrète (pour protéger ce véritable coin de paradis, découvert au hasard, quand écrasés par la chaleur nous cherchions simplement à rafraîchir nos illustres postérieurs, ou parce qu'on n'a aucune idée de la localisation exacte de l'endroit). Puis c'est le retour vers les Pyrénées dont on devine petit à petit les premiers contreforts lors de notre remonté vers Canfranc, dernier bastion espagnole avant d'entrer dans le Béarn.