Partout dans Pakse on peut voir des affiches pour visiter, avec un tour opérateur, le fameux plateau. Visite à la journée, ou sur deux jours (et nuit chez l'habitant), avec guide et voiture climatisée.
On part sur notre scooter loué tout neuf et on file vers l'est, pour une boucle de 250 kms.
Au programme, des plantations de café, des cascades, de beaux paysages. Il fait plus frais sur le plateau.
Toutes les cascades sont d'une manière ou d'une autre payantes: soit vous paierez le parking (pour votre scooter), soit vous paierez l'accès à la cascade, soit les deux! On les trouve jolies, mais on est loin du sauvage rencontré à Chi Phật.
Bref, ce petit tour sur le plateau nous permet de souffler un peu du vélo, mais on n'est pas non plus subjugués.
Pas facile de poser la tente à l'abri des regards. On suit une piste sur quelques kilomètres et nous voilà à l'aplomb d'une belle et longue pente, qui domine la vallée. La vue est sympa: des montagnes à gauche, les champs et forêts en face, à perte de vue, et une culture abandonnée ou coule une petite rivière sur la droite.
Est ce que la culture est vraiment abandonnée? Il y a une petite cahute juste la, avec des bouteilles d'eau, quelques vieux vêtements, et la paille à été brûlée il n'y a pas longtemps... on attend un peu, mais on se voit bien installer notre tente ici. Après tout, on a un beau point de vue, de l'eau vive pas loin, on est au calme. Y a même une petite cabane.
Un homme descend vers nous, en provenance du champs abandonné, il vérifie au passage les pièges qu'il a posés ça et là. Il n'a pas l'air très étonné de nous voir. Il a la soixantaine, est tout fin, assez petit. Ses vetements sont soit trop petits, soit trop grands, soit très abîmés.
Il commence à parler laotien, et voit bien à nos rires gênés et nos haussements d'épaule qu'on ne comprend rien. Mais il continue, il sourit. On demande tant bien que mal si on peut dormir ici. Il a l'air de dire oui. On lui offre quelques bananes, patates douces, qu'il s'empresse de ranger dans sa besace. Et les petits biscuits, il les mange doucement, parce qu'il n'a plus qu'une dent, ou presque, et elle bouge.
Sa femme arrive quelques temps après. Elle aussi est fine, plus petite que lui. Ses cheveux sont longs, et son visage est marqué par le temps, le soleil, la fatigue. Elle est un peu méfiante au début, nous regarde en biais. Elle s'active, pendant que son mari et nous la regardons. Elle cuisine tout ce qui se trouve dans son panier, c'est à dire ce qu'elle a cueilli ou chassé: des petits alvins, quelques crevettes, des baies, et du tamarin. On partage tout ça, à 4, accompagné de riz gluant (qui était caché sous le toit de la cahute), de nos patates douces, et de ces horribles pains briochés à la viande sucrée en cheveux (on s'est encore fait avoir...). Et pendant qu'on finit de manger, elle retourne un carré de terre pour pouvoir y planter les autres papates douces qu'on avait offert un peu avant.
Personne n'à l'air trop gêné. Lui nous parle comme si on comprenait, et elle utilise seulement les gestes pour communiquer. Elle sort des photos de son sac et nous les montre: c'est ses enfants (ils en ont 3, et tous vivent à Pakse), ou elle, quand elle était plus jeune. On découvre sur sa carte d'identité qu'elle est née en 1950.
L'homme va inspecter un de ses pièges. Il y a un animal, mais il a déjà été attaqué par les autres animaux et insectes. Il s'en débarrasse.
Ils partent quelques instants plus tard, sans prévenir, sans dire au revoir ( ce n'est pas pratiqué ici) leur machette à la main, leurs vêtements en lambris, très lentement, à travers les plantes, à couper une branche ici, un petit arbre la, d'une main sure.
Pendant ces quelques heures ensemble, on s'est posé un milier de questions. Est ce qu'ils vivent la? (Il y avait de quoi faire la cuisine, une natte pour dormir, des vêtements...) Vivent-ils uniquement de leur cueillette/chasse? Sont-ils autonomes? Dans la pauvreté? Voient-ils toujours leurs enfants? Ont-ils apprécié le moment passé ensemble?