Le wagon du rapide Paris-Clermont me paraît luxueux. J'ose a peine poser mon bazar. Une vingtaine de passagers sont entassés (façon de parler lorsque l'on arrive d'où je viens) au fond du wagon, résultat, sans doute, de la règle informatique qui préside à la distribution des billets. Je suis la dernière puisque je viens juste de prendre le mien. Au lieu d'aller m'asseoir à côté d' une jeune fille a la place que l'ordinateur m'a désignée, je m'installe tranquillement au milieu du wagon qui est immense et presque vide. Il n'y a aucun arrêt d'ici Nevers et personne ne risque de monter. J'ai bien fait. C'est là que j'ai commencé à me gratter et que de larges plaques rouges sont apparues sur mon corps.
Pendant trois jours je me suis occupée de ma vieille maman qui maintenant ne marche pratiquement plus. Je crois qu'elle était contente. Un peu triste, je me suis achetée une petite robe, un pull et un foulard et j'ai mis mon jean dans la machine. Retour dans la société de consommation. Maman a caressé doucement mon pull rose en disant "c'est joli" Elle aime que sa fille soit bien habillée. Dès que j'ouvre la porte de la chambre son regard balaye ma silhouette avec un signe d'approbation ou pas. .
Les démangeaisons deviennent insupportables, je suis obligée de consulter. Karen est perplexe, sans doute la gale. Entre le traitement et les consignes sanitaires, le protocole est très lourd. Une prise de sang est nécessaire et la liste est longue car il s'agit, dit-elle, de faire le point. Pourquoi vous raconter tout ça qui est plutôt de l'ordre de l'intime ?
Pour convenir que notre système de santé est exceptionnel car chez le médecin, à la pharmacie et au laboratoire j'ai eu 0€ à payer. En recevant la facture je n'ai pu m'empêcher de penser à Térésa à Erevan, qui fait le ménage pour rembourser l'opération de la cataracte ratée. La France ? Tous, là bas, rêvent d'y venir pour se faire soigner.
En quelques jours j'ai été guerrie (ce n'était sans doute pas la gale) , mais ma maison est toute propre et mes placards bien rangés.
J'aurais pu aussi intituler cette étape"La vie en France".
Ce qui est le plus frappant à mon retour en dehors de ce que j'ai évoqué :
Beaucoup de démarches pour trouver le financement du film. C'est fastidieux, laborieux et stressant. Lorsque j'en parle, ma fille me répond "Mais maman c'est ça la vie active". C'est vrai j'avais oublié.
Et puis je m'occupe des malades avec 2 Pfizer et 2 Moderna, je ne crains rien.