Vie à la ferme, au coeur des paysages enneigés

Publiée le 29/06/2018
Workaway chez Fjóla et François, et leurs enfants Delia, Bastian et Oliver. Ferme, travail au contact des chevaux, moutons, poules et lapins.

Après un voyage sans encombre impliquant une nuit blanche, plusieurs avions et un sandwich d'aéroport, me voilà arrivée en Islande. La première vision de ce pays m'a littéralement coupé le souffle; on m'avait parlé de la beauté de l'Islande, mais elle m'a malgré tout prise à la gorge. Les mots sont impuissants à décrire à quelle point ma première impression a été forte et belle.

Ni une ni deux, à peine descendue de l'avion, je lève le pouce. Un petit quart d'heure sera suffisant pour que deux hommes à bord d'un 4x4 -évoquant particulièrement l'archétype classique des Vikings avec leurs crânes chauves, leurs barbes tressées et leurs tatouages runiques-, s'arrêtent pour m'emmener du côté de Reykjavik. J'en profite pour admirer le paysage, à travers la fenêtre. L'Islande ("pays de glace") porte bien son nom : de la glace et de la neige à perte de vue. Le vent souffle si fort que certaines routes sont fermées temporairement.

C'est en périphérie de Reykjavik que me récupère François, un Hollandais habitant en Islande depuis 25 ans. Le contact passe tout de suite très bien, et nous nous rendons dans la charmante petite ferme de sa famille (Fjóla, sa femme, Islandaise, ainsi que leurs trois enfants, Delia, Bastian et Oliver).


J'admire mon premier coucher de soleil au dessus de l'océan Atlantique, et je soupçonne déjà que je ne suis pas au bout de mes surprises.

Couleurs du ciel et vue de la maison
Stalactites

Le "travail" effectué dans cette ferme est simple. Dans la matinée, nous partons nourrir les différents animaux et les approvisionner en eau (moutons, chevaux, poules, lapins). Si nécessaire, nous prenons le temps de nettoyer leurs boxes et sortons les chevaux dans les prés. Il faut être très prudent avec l'alimentation en eau qui gèle régulièrement. Une fois par semaine, nous apportons - moyennant une promenade en tracteur- des bottes de foin dans les champs où la grande majorité du troupeau passe l'hiver. Nous ramassons les oeufs et rentrons à la maison, où nous pouvons nous détendre, partir en randonnée, regarder des films si la météo n'est pas clémente. Nous cuisinons un peu et entretenons la maison. 

Bastian et Oliver rentrent de l'école en milieu d'après-midi ; nous discutons avec eux, préparons leur goûter et, malgré notre niveau en Islandais, les surveillons lorsqu'ils font leurs exercices de lecture quotidienne. Nous jouons ensemble à la console ou allons dehors faire des batailles de boules de neige.

Dans la soirée, nous retournons avec François -et parfois les garçons- nourrir les animaux pour la nuit et rentrer les chevaux. Ce moment est souvent le lieu propice à de nombreuses discussions et jeux, toujours accompagnés par Bot, la chienne de la famille, qui malgré ses gênes n'a jamais vraiment tenu de la bergère et préfère chasser les oiseaux ou les boules de neige à surveiller les moutons.

Icelandics
Merveilleuse Islande

L'objectif principal de mon voyage en Islande était de pouvoir observer les aurores boréales, un rêve de longue date. La ferme étant isolée du village, le cadre est parfait -sans pollution lumineuse-.

Chaque soir, je guette fébrilement les chances d'apparition d'aurores, en fonction de l'activité solaire (que je peux consulter sur une application) et de la couverture nuageuse; Dès les premiers soirs, je peux observer quelques mouvements dans le ciel, quelques traces vertes, mais très peu discernables. Je garde l'espoir d'en voir une "vraie" au cours de mon séjour.

Un soir, environ une semaine après mon arrivée, je reçois une alerte m'indiquant que les chances d'aurores sont relativement élevées. Durant la soirée films quotidienne avec François et Paulina, je garde les yeux rivés par la fenêtre, à la recherche de la fameuse "trainée lumineuse blanche" qui se veut annonciatrice du début du spectacle.

Il est environ minuit-une heure du matin, la soirée suit son cours ; soudain, je la vois. La longue lumière blanche dans le ciel, allant d'un horizon à l'autre. Faisant fi de tout contrôle, je hurle sous les rires des autres, et commence à courir dans toute la maison pour rassembler mes affaires. Pull n°1, pull n°2, manteau, sous-pantalon, pantalon, paires de chaussettes, deux paires de gants, bonnet, cache-cou, appareil photo et trépied. Je sors en courant ; dans la panique, j'oublie ma troisième couche -imperméable- de pantalon, que je regretterai amèrement par la suite.

Je cours dans le champ voisin pour m'éloigner de la maison et de la lumière des fenêtres. J'installe mon trépied et je lève les yeux au ciel. La trainée blanche est toujours présente, et sa lumière semble s'intensifier. Je tente une photo : la lumière est bien verte à l'écran.

Petit à petit, la lumière semble s'étendre en hauteur, devenant semblable à un rideau agité par un vent invisible. Le ciel est comme coupé en deux par ce voile dansant qui m'apparaît désormais vert et rouge. Tout est calme, la lumière est douce.

Et soudain, le ciel explose. Des branches de lumières s'étendent partout dans le ciel autour de moi, éclairant le champ alentours. Les volutes tourbillonnent, se croisent, le ciel est si réellement vivant et si beau que j'en pleure.

Le plus surprenant reste toutefois le silence absolu ; de telles lumières, de tels mouvements, une telle émotion devrait faire du bruit, éclater, assourdir même - mais il n'en est rien. Le silence de cette soirée est le silence le plus complet que j'ai pu entendre jusqu'ici, à peine troublé par mes rires extatiques. Cette absence totale de bruit contribue, je pense, à rendre l'expérience si forte ; impossible de détacher son attention des ballets lumineux.

Je reste longtemps allongée dans la neige, les yeux rivés sur le ciel qui n'en finit pas de danser. Trempée, mais heureuse. En rentrant, plus tard dans la nuit, incapable de parler à cause du froid qui m'engourdit le visage, je n'ai qu'une hâte : être le lendemain soir pour retourner scruter le ciel.

La fameuse lumière qui apparait
Ballet de lumières du Nord, l'expérience intense
"Et le ciel explosa..."
Plage gelée
Couchers de soleil
Hiver polaire, toujours avec ces lumières crépusculaires
Et on fait tomber les 6 couches
The road goes ever on

Les mots me manquent pour exprimer mon affection pour cette famille. Nos longues discussions et la complicité que nous nous sommes découverte ne m'aura pas seulement permis d'apprendre des choses sur eux, leurs vies, l'Islande ; j'ai également beaucoup appris sur moi, sur mes capacités et sur mes souhaits. Leur maison, si chaleureuse, est devenue la mienne, et j'ai découvert en eux une nouvelle famille. A l'heure où j'écris ce texte, presque six mois après mon retour, nos échanges sont toujours aussi fréquents, et ce n'est qu'une question de mois avant que mes pas ne me portent de nouveau sur le seuil de leur porte.

J'ai également fait la connaissance, lors de mon séjour, de Paulina, allemande de 19 ans, tout juste diplômée et partie en baroude. Nous sommes rapidement devenues amies, et j'espère sincèrement que nous nous reverrons un jour, dans ce pays ou dans un autre.

Ber er hver að baki nema sér bróður eigi. Takk fyrir aIIt.

Plus que des amis, une nouvelle famille

Je te laisse jeter un coup d'oeil à la vidéo de mon séjour ici :)

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