Nous avons passé notre première nuit chez Boldo et ses amis. Cette nuit, nous n’avons pas eu froid, nous n’avons pas eu à nous lever toutes les heures pour mettre du bois dans le feu, le chien n’a pas du tout aboyé de la nuit et je constate que je ne sais toujours pas mentir. En vrai, nous avons eu froid, nous nous sommes levés toutes les heures, et le chien a aboyé du couché jusqu’au levé du soleil. Cependant, nous nous réveillons avec un surplus de motivation pour cette première journée à cheval afin d’aider les éleveurs qui nous accueillent. En avant !
Aujourd’hui, il est question d’aider un éleveur, ami de Boldo, Dembe et Tuvanna, à déplacer son troupeau de plus de 700 bêtes (chèvres et moutons) du camp d’hiver au camp d’été. 5 bons kilomètres sont nécessaires pour aller récupérer le bétail dans les hauteurs.
Ces premiers kilomètres sont pour moi l’occasion de prendre mes marques avec la petite monture qui m’est confiée pour la semaine. Je ne suis pas un cavalier depuis longtemps, mon style d’équitation se rapproche plus du « je m’accroche comme je peux » que de celui d’un Galop 7. Ces premiers obstacles sont une véritable mise en bouche : chemins sinueux, grandes plaines, traversées de rivières et bords de cours d’eau avec quelques mètres de surplomb.
En plus de ne pas avoir énormément d’expérience, les équipements de mon modeste entrainement n’avaient rien à voir avec le matériel disponible : les selles fournies par Randocheval sont complètement différentes de celles avec lesquelles je m’étais entraîné. Je ne dirai pas que les selles sont inconfortables, c’est même l’inverse : elles sont composées d’un gros coussin fourré de laine de mouton, avec de 2 arceaux à l’avant et à l’arrière. Même après plusieurs heures sur le cheval, mes fesses sont encore en bon état. Les arceaux m’auront je pense toute de même plusieurs fois sauvé la vie, mais aussi anéanti mes espoirs de descendance lors de freinage brusque… si tu vois ce que je veux dire.
Notre travail consistait à créer un encadrement du troupeau, en veillant à ne pas laisser de moutons et chèvres se faire la belle. Il faut rester vigilant non seulement pour garder le troupeau compact, le pousser à avancer dans la bonne direction, mais aussi pour ne pas écraser les bébés qui parfois traînaient le pas. N’empêche, figure toi qu’un troupeau de 700 bêtes, ça fait un sacré raffut !
Il est désormais temps de faire traverser la rivière à notre troupeau de bêtes. Nous nous plaçons de façon à faire une sorte d’entonnoir qui mène directement dans l’eau. Il est prévu de pousser le troupeau en l’effrayant jusqu’à le faire s’engouffrer dans notre goulot, pour leur montrer qu’il est temps de traverser. Bien sûr, il y a du courant, nous avons par précaution attrapé les petits pour les mettre dans un camion qui traversera de son coté afin de n’en perdre aucun. Attraper des bébés chèvres, c’est plus dur et plus sportif que ce qu’on pense… tu peux m’croire…
Une fois les petits à l’abris, nous nous employons de toute notre énergie à effrayer le troupeau en hurlant et en secouant des écharpes dans leur direction. Les premiers animaux étant en bord de rive, ils n’ont plus en théorie aucune autre issue que de se jeter à l’eau. J’ai dit : EN THÉORIE ! Ouep, un mouton ça a suffisamment de force pour retenir tout un troupeau qui le pousse. On passe donc au plan B…
Désormais, on rigole plus, ça fait 5 minutes que nous crions et sautons comme des danseurs de hip-hop en pleine crise d’épilepsie, il est temps de sortir l’arme lourde. Les éleveurs attrapent au lasso les deux bêtes dominantes, et à l’aide de leurs montures, les tirent de force au milieu de la rivière. C’est un gage d’assurance pour le reste du troupeau, qui commence à rentrer dans l’eau, c’est une première victoire…
Arrivé au camp d’été, nous sommes invités à nous désaltérer à l’intérieur de la yourte familiale. L’éleveur que nous accompagnions nous annonce que nous l’avons grandement aidé et que nous lui avons fait gagner plus de 5 heures sur cette étape de transhumance. Pas peu fiers, nous acceptons volontiers du thé au lait, de la crème ainsi que du yahourt au lait de yack (une sorte de faisselle, un peu plus acide, c’est miam !) qui nous sont immédiatement proposés.
Après s’être reposé une petite demi heure, nous reprenons nos montures pour retourner à notre camp, à quelques kilomètres d’ici. Cette journée, nous avons fait pas moins de 20 kilomètres à cheval, à suivre au pas et à veiller sur le troupeaux composé de 700 moutons et chèvres. Par avance, nous savons que nous dormirons bien ce soir… d’autant plus que demain, nous partons pour 50 (CIN-QUAN-TE !) kilomètres à cheval pour aller visiter le monastère de Tokhon, à 2400 m de d’altitude.