Nous nous sentons bien dans cette ville. Nous ne croisons pratiquement pas d'européen et nous faisons souvent accoster pour une photo, un selfie ou simplement le fameux "Hello Mister" ou" Where are you from ?" que l'on nous adresse sans fin.
Pas de curiosité intéressée, tout cela est très jovial et naturel. Ici on salue l'étranger quel qu'il soit. Les jeunes surtout sont curieux de nous connaitre. Bon nombre de photos se font dans notre dos et nous avoir dans leur galerie de portable apparaît pour beaucoup de locaux comme une fierté.
Nous remarquons que le fait de répondre avec les quelques phrases en indonésien que nous maîtrisons avec peine renforce cette proximité; Les gens sont heureux de voir que nous avons fait un petit effort pour communiquer et pas simplement en anglais que peu maîtrisent finalement ici.
La visite du marché couvert est une preuve de l'authenticité et de la bienveillance des sentiments des habitants de cette région. Alors que nous sommes les seuls touristes étrangers, pas de harcèlement dans les boutiques, Que des sourires et des photos, encore et encore.
La ville de Bukittinggi est construite sur une hauteur, à près de 800m d'altitude. Entourée de volcans, elle est une halte appréciable et fraîche pour visiter le pays minang. Occupée par les hollandais, elle a gardé quelques monuments intéressants comme le fort de Kock et la Tour de l'Horloge (Jam Gadang) ainsi que des canyons japonais, souvenir de la seconde guerre mondiale. Nous n'avons pas vu ces derniers, à priori, c'est pas terrible d'après les échos...
En revanche, le soir, nous avons eu le droit à de la "mosquées-stéréo" avec différents lieux de culte qui appelaient en même temps à la prière. Vous pouvez écouter ce que ça donne ci-dessous !!
Nous décidons de partir admirer le lac Maninjau en bus local. Premier défi : trouver la "gare routière"; A force de demander le "bus station", on finit par comprendre que les bus sont tous au "TERMINAL". On emprunte pour 1€ un taxi local sans âge conduit par un jeune très sympa fan de musique métal puis nous débouchons sur une place où attendent des dizaines de bus dans une ambiance colorée et bruyante.
Tout de suite, et c'est ça qui est bien à Sumatra, à peine descendus du taxi, toutle monde sait que nous allons au lac Maninjau. Un type nous emmène direct dans son "bus" qu'il commence à charger. Le truc à savoir quand on prend le bus est qu'il ne part que quand le chauffeur décide qu'il est suffisamment chargé. On attend donc patiemment à l'ombre, regardant la vie qui s'anime, écoutant les discussions des gens qui attendent et répondant tant bien que mal aux sollicitations et questions qui fusent :
-Ah oui, la France ! Zidane, bien, !! musulman !!
- Et Pogba, il est musulman non ?
On sent qu'il y a une réelle volonté de savoir si chez nous les musulmans sont présents et la question du "combien y a t-il de musulmans chez vous ? " nous sera posée.
Bon, ce n'est pas tout, après 1h30 d'attente, le bus va partir. 1h45 de trajet en essayant de discuter avec notre dictionnaire indonésien. Nous n'avons pas vu le temps passer et nous attaquons les fameux 44 virages qui descendent au lac.
Le bus nous dépose sur une route vers 13h30 et nous avons un peu de mal à rejoindre le bord de l'eau. En plus il fait très chaud aujourd'hui et nous ne savons pas trop où aller;
Comme nous cherchons à manger, nous sommes interpellés par un bonhomme jovial et prolixe qui nous fait presque asseoir à sa table de restaurant et nous voilà partis à commander sa spécialité de poisson du lac évidemment. Nous sommes les seuls à manger et nous faisons alors plus ample connaissance avec cette figure locale "Mister Porcupine" (Porc-épic pour les intimes).
Il nous raconte des histoires dont on ne sait si tout est vrai ou brodé. Il est connu pour avoir guidé les premiers touristes aux environs du lac, est passé dans un journal des Pays-Bas qu'il nous exhibe fièrement. Vient le temps de la séance photos avec bien sûr son collier tout en épines de porc-épic !!
Bon, par contre, quand il dit qu'il reste 20 tigres dans la forêt autour du lac, on le laisse dire mais les derniers félins de cette espèce sont bien sur Sumatra mais à 500 km plus au sud. C'est aussi pourquoi, et nous l'apprendrons plus tard, que ce brave monsieur est aussi appelé "Monsieur Too Much" (Monsieur Trop)...
Comme on ne sait pas quand passe le bus pour remonter, une voiture s'arrête au bord de la route et, après une courte discussion, nous remonte pour un prix modique à Bukittinggi.
Le lendemain, nous avons convenu avec Lombo, un guide local, une journée découverte du pays Minang, en voiture.
La culture Minang est très particulière puisque c'est la plus grande société matriarcale au monde. Les Minangkabau représentent environ 6 millions de personnes sur Sumatra. Les femmes sont propriétaires de la terre, des biens immobiliers et mobiliers et les transmettent à leurs filles. Les hommes n'ayant rien, ils sont contraints d'émigrer s'ils veulent faire fortune. Toutefois, leur devoir est de faire profiter le village de leur réussite et ils s’occupent de la religion et des affaires politiques.
Les enfants portent le nom de clan de leur mère. L'homme qui en a la responsabilité n'est pas le père, mais l'oncle maternel . Pour le mariage, c'est la famille de la fille qui vient demander la main du garçon. En cas de divorce, la femme garde les enfants.
L'étymologie populaire fait provenir le nom Minangkabau des mots minang .« victorieux ») et kabau (« buffle »). Selon la légende, ce nom proviendrait d’une dispute entre les Minangkabau et un prince voisin. Pour éviter une bataille, le peuple avait proposé de faire se battre à mort deux buffles, chacun représentant une des parties. Le prince amena le plus grand et agressif des buffles, mais les Minangkabau rusèrent en amenant un bébé buffle affamé, dont les cornes avaient été taillées de manière à être aussi aiguisées que des lames de couteau. Voyant le buffle adulte au milieu du champ, le bébé courut vers lui espérant du lait. Le grand buffle, ne voyant aucune menace de la part du bébé, ne lui prêta pas attention, cherchant un adversaire à sa mesure. Quand le bébé fouilla en cherchant une éventuelle mamelle, il blessa mortellement le buffle et apporta la victoire au peuple Minangkabau.
Les maisons traditionnelles comportent une avancée pour rappeler la forme de cornes du buffle, symbole de ce peuple. La langue utilisée autour de Padang et Bukittinggi est donc le minang. Nous visitons le palais Pagayurung, capitale de la société Minagkabau, détruit en 2007 mais reconstruit à l'identique depuis.
Comme nous annonçons à notre guide Lombo que nous sommes tous les deux instits, ni une ni deux, pour nous faire plaisir, il nous emmène dans une école primaire publique. Par chance, nous arrivons à priori à l'heure de la récré ! Tout de suite, c'est l'effervescence et nous sommes invités à discuter avec le personnel enseignant. Personne ne parle anglais, Lombo traduit et les échanges sont super intéressants.
Comparaison des matières étudiées, des horaires et même des salaires !! Tout y passe ! Nous allons ensuite dans une classe où une trentaine d'enfants se regroupent pour répondre à quelques questions. Manifestement la France est un territoire inconnu pour ces jeunes élèves. Ils sont tout excités quand on leur apprend à dire en français "Aurevoir" qu'ils répètent sans cesse avant notre départ.
Bien sûr, photo obligatoire et on lève le pouce !!!