24 heures de voyage pour atteindre notre objectif. Voiture, train, marche, bus, avion, train, re-train et voiture. Le tout couronné par une belle nuit blanche... Autant dire que c'est avec soulagement que nous atteignons la petite ferme isolée de Jan-Ols Gården, perdue dans les bois de Dalécarlie Suédoise !
Dès notre arrivée, nous rencontrons la "fine équipe" des wwoofers; Louis, Chloé et Elodie, trois français, et Kristina, autrichienne. Nous serons rejoins plus tard par Jonas et Lea, un couple d'allemands.
Mikaela et Tobias, les propriétaires de la ferme, sont sympatiques; Mikaela, toujours pieds nus, est partisane d'un mode de vie proche de la nature. Tobias, son compagnon, est un modèle de Vikingitude : chauve, tatoué, des perles dans sa barbe, il travaille de nuit et nous ne le voyons que peu.
Outre une trentaine de chevaux et poneys de toutes tailles qu'ils recueillent, Mikaela et Tobias élèvent également une petite quarantaine de chèvres, mâles et femelles. Les chevreaux de cette année sont âgés de 6 semaines lorsque nous arrivons, et auront rapidement raison de nous avec leurs petits sauts maladroits et leur besoin d'affection.
La journée commence tôt ici. Entre 6h30 et 7h30, selon les jours, tous les travailleurs se retrouvent dans la cour herbeuse de la ferme. Le petit-déjeuner attendra !
Première mission : ravitailler tous les animaux en eau et nourriture. Chevaux, chèvres, poneys, lapins : le tuyaux d'arrosage, les seaux pleins et les brouettes de foin voyagent bon train. Le soleil est déjà levé, l'air sent bon la rosée du matin.
Ensuite, direction la chèvrerie, en bas de la route de la ferme. Là, les chèvres femelles et leurs petits attendent patiemment d'être emmenés aux pâturages, de l'autre côté du chemin. Dès notre entrée dans le bâtiment, nous sommes assaillis par les chèvres qui tentent de nous grimper dessus et de manger nos cheveux et nos vêtements. Nous mettons en place la trayeuse ; deux par deux, les chèvres (toujours dans le même ordre, joli exemple de conditionnement), viennent se faire traire. Nous les emmenons en laisse par binôme dans les prés. Une fois toutes les chèvres allaitantes emmenées, c'est l'heure de la "course des petits". Impossible de mettre des laisses aux plus jeunes ; nous emmenons donc les chèvres adultes restantes, et l'un d'entre nous court devant le troupeau pour attirer les petits qui suivent, courant comme des dératés tout autour de nous.
Une fois les femelles et les petits installés, nous nous chargeons d'emmener les mâles dans leur pré -ils passent la nuit dans un petit enclos avec abri-. Ceux-ci sont plus fougueux, et plus difficiles à tenir en laisse, mais à plusieurs nous sommes capables de tous les emmener. Nous avons même nos préférés, et bientôt nous connaissons tous leurs noms (souvent en rapport avec la mythologie scandinave). Nous remontons le lait dans la crèmerie ; il est environ 10h, l'heure de manger.
Une fois le petit-déjeuner pris (un bol de muesli avec une demi-pomme et une cuillère de confiture en général), nous voilà repartis au travail. La principale mission de notre séjour : nettoyer l'enclos des chèvres mâles, et les 50 bons centimètres de "goat-shit" sur toute sa surface. Autrement dit, le pelletage et le brouettage n'ont absolument plus aucun mystère pour nous. Nous gardons une bonne moyenne de 30 ou 40 brouettes par jour, sachant qu'elles doivent être emmenées à l'autre bout de la ferme, sur la "goat-shit mountain". Des défis sont rapidement lancés pour nous motiver, et la ferme résonne de nos éclats de rire.
En parallèle, nous travaillons dans la petite cabane en construction qui deviendra la fromagerie ; pose d'isolation, d'enduit, peinture... Nous n'avons pas pu voir l'aboutissement de ce travail mais j'ai le sentiment que faire le fromage sera un vrai plaisir pour Mikaela dans ce cabanon.
Le déjeuner est en général pris vers 15h; Mikaela et Tobias sont adeptes d'un régime sans carbohydrates. Nos repas sont principalement composés de riz et/ou de pommes de terres, parfois agrémentés d'un bout de fromage (le fameux Gouda Suédois qui s'épluche).
Retour ensuite au travail, selon les besoins de la ferme : remplir les mangeoires, nettoyer les boxes, continuer les brouettes, transporter des bottes de foin, travailler dans la laiterie, nettoyer la maison, ...
Pendant la deuxième semaine, des jeunes suédoises sont présentes pour un camp équestre dans la ferme. Notre travail consiste, en plus de l'entretien de la ferme, à nous occuper d'elles : les surveiller quand elles montent, les aider à harnacher les chevaux (à cru et sans mords, selon la tradition), leur faire à manger, ...
Même si elles ne parlent pas un mot d'anglais, nous réussissons à communiquer un peu et à rire avec elles.
En début de soirée, c'est l'heure de la douche pour les chanceux dont c'est le tour. Les autres peuvent se poser et discuter dans la cour de la ferme, ou préparer le repas du soir, qui sera servi après la rentrée des chèvres. Nous allons chercher tout d'abord les mâles, que nous emmenons dans leur enclos pour la nuit, puis les femelles et les petits que nous ramenons à la chèvrerie.
Chaque soir, une fois les chèvres rentrées, c'est "Cuddle time" ("l'heure des câlins"). Nous nous installons tous dans la grange, sur la paille ou sur les rondins de bois, et les chèvres, notamment les petits, ne manquent pas de venir réclamer des caresses et se coucher sur nos genoux -ou nous grimper sur le dos-.
Ici, elles sont bien traitées ; si elles sont traites chaque matin, les petits ne sont pas séparés des mères, et Mikaela n'a pas le cœur d'envoyer les mâles à l'abattoir lorsqu'ils grandissent (comme le veut le business du lait) et les garde dans un pré adjacent.
Le repas du soir est pris vers 21h ou 22h ; nous discutons jusque tard dans la soirée ou regardons Pauline dessiner. Puis direction le petit grenier aménagé de la ferme pour une nuit de repos.
L'eau vient rapidement à manquer cet été, dû à l'hiver peu enneigé qui a précédé et n'a pas permis de remplir le puits de la ferme.
Les douches sont donc réparties en roulements ; nous sommes 2 par jour à pouvoir en prendre une rapide, dans le petit cabanon au fond du jardin. (autrement dit une douche tous les 3 ou 4 jours selon le nombre de wwoofers).
Nous décidons rapidement d'aller nous décrasser dans les lacs alentours, comme beaucoup de Suédois le font. Savon biologique en main, nous nous rendons au point d'eau le plus proche, du côté d'Hansjon.
L'eau est fraiche (environ 10°C), mais la sensation est vivifiante, et le sentiment de propreté vaut largement le coup -même si nos peaux sont rouges d'humus en sortant de l'eau, impliquant un passage au tuyau d'arrosage en rentrant. C'est ça aussi, l'aventure!
Tout au long du séjour, nous nous amusons à nous lancer des petits défis : plonger dans le lac glacial ou tester l'alcool du grand-père de Tobias (vodka Viking à 60° tout de même!) par exemple. Pour nous stimuler, Mikaela nous fait parfois cadeau de chocolat ou de glace pour "Fika", l'heure du thé. Nous organisons également une soirée pique-nique au bord d'un lac. L'argent manque parfois dans la ferme mais c'est lorsque l'on donne du peu qu'on a que l'on donne réellement.
Mikaela nous emmène, avec Kristina et Louis, pour lui donner un coup de main au marché artisanal de Strömsdal, où elle vend du fromage et de la poterie.. Nous surveillons les chèvres et profitons de la beauté des bois alentours.
Jette un coup d'oeil à la vidéo ci-dessous, un montage de nos aventures à la ferme :)
De nouveaux horizons nous attendent, plus avant dans le pays. Cette expérience aura été riche et nous aura beaucoup appris sur la valeur des choses, la vie en communauté et la générosité.