Arrivée au petit matin dans la bourgade de Tupiza, tout au sud de la Bolivie, à 1h30 de la frontière argentine. Chargés comme des mules, nous nous entassons tant bien que mal dans un taxi qui nous amène au club hippique de Canducho. Nous avons connu Canducho en 2019, lors d'un court séjour à Tupiza et, après lui avoir parlé de notre projet de voyage, nous nous sommes formés à ses cotés il y a tout juste un an. Nous retournons donc en terrain connu et sommes contents de pouvoir compter sur l'appui d'une connaissance fiable pour concrétiser notre voyage, à commencer par l'achat des chevaux en Argentine. Nous entamons sans tarder une petite formation musclée à la maréchalerie, avant de nous embarquer avec quatre chevaux (dont un qui testera le bat) pour une première journée d'essai de randonnée, en compagnie de Ronald.
Des paysages familiers défilent sous nos yeux, ils sont magnifiques avec leurs montagnes rouges, leurs cactus, leurs rivières presque asséchées.
Apres 7 longues heures de pas, nous arrivons en début de soirée chez l'habitant, où nous plantons la tente dans la basse-cour. Les 4 chevaux ont bien marché, nous avons expérimenté un bat manouche en chantonnant Jobi-Joba. Nous souhaitions en effet transporter tout notre chargement et ça a, bon an mal an, fonctionné sur cette première journée. Nous pensons que nous pouvons l'améliorer, mais on a du mal à visualiser comment nous passer de cette exquise toile de jute bleue, d'une esthétique inégalable.
Réveillés par le coq, qui a décidé de chanter ses matines à 20 cm de notre tente, les oies, les poules, le chien, les chats et les mouches, nous émergeons, reposés, et satisfaits de notre matelas gonflable de luxe de 4 kg, qui avait fait l'objet de longs et houleux débats dans les rayons de Décathlon.
Nous voilà gaiement repartis en selle -un peu courbaturés tout de même. Nous alternons avec Toccata, la jument de bât, pour nous familiariser avec la tenue du cheval en main. C'est relativement simple avec cette jument d'expérience, ce sera probablement plus folklorique avec nos futurs chevaux.
Le soleil tape fort, mais nous avançons bien. A une heure de l'arrivée, en traversant le lit pierreux de la rivière asséchée, Colchinillo fait un soudain bond en l'air et expulse littéralement Barbara qui tombe à plat dos sur les cailloux, en se faisant plutôt bien mal. Comme il est encore jeune et haut perché sur ses longues jambes, on pense qu'il a maladroitement trébuché (pour la 512ème fois) et s'est fait peur tout seul. On se confirme à nouveau la nécessité impérieuse de trouver des chevaux suffisamment matures et au pied relativement sûr pour notre chevauchée. Heureusement rien de grave pour Barbara, qui a tout de même fait de la supra médication avec des pansements au piment trois jours durant afin de pouvoir de nouveau s'asseoir.
S'ensuivent deux jours d'attente à Tupiza, le temps du rétablissement de Barbara, et de la coordination entre Canducho et son correspondant argentin pour l'achat de nos chevaux. Nous errons dans Tupiza, à la recherche de quelques outils de maréchalerie, en compagnie de Ronald, et profitons des réjouissances locales. Entre autres, la sopa de cabeza, qui n'est autre qu'une soupe dans laquelle trempe une demi-crane de chèvre, tranchée dans la longueur. Elle se déguste dans le brouhaha du marché, au milieu duquel on profite de la douce mélodie de louanges à Jésus chantées à tue-tete dans un haut parleur grésillant, ou encore des odeurs cadavériques des viandes exposées sur les étals au soleil. Mais nous nous sentons bien, nous sommes un peu comme chez nous.
Finalement, départ prévu mardi 5 avril au matin pour nous, Canducho nous rejoindra deux jours plus tard.