Ce matin, on n’y a pas coupé : les jeunes espagnols ont laissé longuement sonner leur réveil à partir de 5 h du matin alors qu’ils sont restés au lit pour une grasse matinée ! Un exemple typique de « camino-touristes » qui en plus paient pour se faire porter son sac à dos ! Nous ne cherchons pas à engager la conversation avec eux, mais nous imaginons que comme beaucoup d’espagnols, ils marchent uniquement sur les 100 derniers kilomètres du chemin pour obtenir leur Compostella.
Nous
partons vers 8 h 30 et regagnons la nationale. Beaucoup de marcheurs, mais
beaucoup d’entre eux ont plus l’air de touristes que de pèlerins. La
circulation s’intensifie au fil des kilomètres. Toujours de belles côtes, mais
sans la fatigue de l’étape et avec la fraicheur du matin, elles ne paraissent
pas trop pénibles. La veille au soir, nous avions décidé d’entreprendre une
courte étape et de nous arrêter à O Pedruzo afin de rentrer dans Santiago le
lendemain au petit jour.
O Pedruzo se révèle être une ville impersonnelle et déprimante construite le long d’une nationale. La magie du chemin semble partie, nous l’avons laissée dans la montagne avec les authentiques pèlerins.
Nous déjeunons et décidons de poursuivre notre route pour atteindre Santiago dans l’après-midi.
Quelques
kilomètres avant Santiago, nous quittons la nationale pour rejoindre la piste
des marcheurs. Le chemin est très agréable, ombragé, bordé d’eucalyptus qui
embaument délicieusement l’atmosphère. Un vrai havre de paix. Quelques
marcheurs mais pas aussi nombreux que ceux que nous avons vus ce matin. Des
côtes très raides que nous montons parfois en poussant le vélo. L’impatience
d’atteindre notre but nous a redonné tout notre courage et notre enthousiasme,
la magie du chemin est revenue.
Au détour d’une énième bosse, nous apercevons les flèches de la Cathédrale, séquence émotion fugace mais bien réelle, nous touchons au but, au « graal », l’objectif final est en vue, à portée de quelques coups de pédales. Pour Pierre, le moment est encore plus intense : il a réussi, il a surmonté ce p… d’handicap . Quelle belle revanche sur le destin !
En arrivant sur la
ville au sortir de la piste, nous sommes très agréablement surpris par le peu de circulation : SANTIAGO est à nous !
Photos du panneau à l’entrée de la ville qui est par ailleurs très laid et couvert de tags, puis direction la cathédrale.
Dans les ruelles de la vieille ville, nous nous mêlons aux pèlerins à pieds et aux touristes. Nous jouissons un moment de l’ambiance de la vaste place devant la cathédrale et sommes très émus, comme les millions de pèlerins arrivés au but au fil des siècles. Puis c’est la queue pour obtenir cette fameuse Compostella !
Emotion
Bières du finisher + selfies en terrasse. Nous sommes fiers et heureux d’être là, satisfaits d’avoir surmonté les doutes, les difficultés, d’avoir mené à bien ensemble ce projet tant rêvé, fantasmé, sublimé…
C’est pour moi un sentiment d’accomplissement, c’est l’aboutissement d’un projet, le couronnement de nos efforts lors de notre préparation physique et pendant ces trois semaines.
Ce bonheur est encore plus intense pour Pierre : alors qu’il ne peut plus parcourir que quelques kilomètres en marchant dans une journée, il a réussi à boucler ce périple de près de 1500 km en 18 jours. Quel dépassement de soi pour aller jusqu’au bout des côtes, des longues étapes, pour supporter la chaleur, la fatigue ! Son courage et sa détermination forcent le respect…
Nous sommes comblés, mais déjà le blues du post-projet et de la fin des vacances pointe son nez…
L’idée d’un autre voyage à vélo de Santiago à la maison par la voie du Nord commence à germer…
Ce que nous retenons :
- Tous les moments de petits bonheurs du Chemin : une sieste, un café, une bière, une glace sur une terrasse, le « Menu Pèlerin » pris en fin de journée dans de magnifiques albergues, un petit coin d’ombre, La communion avec la nature, tous les jolis paysages avec multiples changement de tableaux dans une même journée, les jolis villages, les magnifiques cathédrales et les petites églises qui jalonnent le chemin, les belles rencontres, néanmoins trop rares en vélo par rapport à la marche…
- La sensation d’être pleinement ancrés dans
l’instant présent, de vivre chaque minute intensément, qu’elle soit pénible ou
agréable. Redonner du temps au temps…
- Le plaisir de vivre pendant quelques semaines déconnectés de notre monde hyper connecté en nous reconnectant à toutes nos sensations visuelles, olfactives….
Sur le plan technique, ce projet a bien été préparé, nous sommes contents d’être partis avec d’excellents vélos … on aurait pu ce décharger à St Jean Pied de Port, une tente n’est vraiment pas utile en Espagne, il y a des albergues partout et bien souvent moins chères que le camping.