Après nos deux premiers jours à Chiang Mai nous avons décidé d'y poser nos valises pour 1 semaine. C'est notre petite habitude désormais, quand on se sent bien quelque part on range le sac dans l'armoire et on sort le bout de plastique troué qui nous sert de tongs. En voyageurs avertis (on a juste le guide du routard pas de quoi se la péter..) nous savions que Chiang Mai est l'un des meilleurs endroits pour observer les célébrations de Loy Kratong. En effet, début décembre les thaïlandais célèbrent le dieu de la rivière en lui envoyant lanternes et offrandes. Par chance, ayant sympathisés avec la propriétaire de notre hébergement nous avons conçu et décoré avec elle nos propres offrandes flottantes en tronc de bananier avant de les lâcher dans le courant du petit ruisseau du coin.
On comprend aisément l'objet de ces cadeaux au dieu de la rivière en reniflant l'odeur du petit ruisseau bétonné en question.
Côté ciel, les lanternes font leur job. La pluie d'étoiles artificielles est aussi impressionnante que magnifique. Il en pleut tellement que l'aéroport de Chiang Mai est fermé pour l'occasion (oui oui vous avez bien lu). Enfin côté traffic, la parade bat son plein. Les chars décorés aux couleurs d'universités, d'entreprises, et même de sites de rencontres traversent les rues, elles aussi fermées pour l'occasion (c'est pire que le 17 Novembre). La ville est en fusion. Tout le monde s'improvise restaurateur ou vendeur d'offrandes, les gamins balancent des pétards sous le regard amusés des mamys, les feux d'artifices pètent dans tous les sens dans l'anarchie la plus complète. Si le dieu de la rivière ne leur pardonne pas après ça..
Tellement absorbés par la découverte de ce magnifique pays qu'est la Thaïlande nous en avons presque oublié que l'heure tournait. Les jours défilaient et nous rapprochaient à pas de géant de la clandestinité une fois la validité de notre Visa expirée (même si tout s'arrange facilement à coup de billets ici).
Nous avons donc décidé de passer la frontière terrestre depuis le village de Chiang Kong. Après s'être acquittés des formalités administratives et du paiement du droit d'entrée, majorée d'une taxe "spécial dimanche", nous avons traversé la frontière matérialisée par le fleuve du Mekong pour rejoindre un bateau en contrebas.
C'est ainsi que débuta notre croisière en direction de Luang Prabang. Un voyage de 2 jours et une nuit sur le Mekong qui n'aura pas été de tout repos. Notre petit bateau de bois accueillait pas moins de 150 personnes dont environ 97% de touristes. Pour trouver un peu de vie locale, il fallait donc se rabattre sur les petits villages ethniques dispersés tout au long de la berge où les enfants jouant nus dans l'eau et les pêcheurs au filet côtoyaient d'imposants groupes de buffles en pleine cure thermale sur les bords du Mekong.
Le soir, nous avons fait escale dans le petit village de Pak Beng où depuis le passage du bateau, les anciens pêcheurs se sont transformés en de coriaces tenanciers de guesthouse en bambou. C'est d'ailleurs dans ce petit village de Pak Beng que nous avons vécu l'une des expériences culturelles les plus décalées de notre voyage.
Pak Beng: 600 habitants, perdu au bord Mekong dans la partie vallonnée du Nord Est Laotien. Il est 23:30 nous buvons une bière en compagnie de deux amis dans l'unique bar du village quand tout à coup un groupe de quadragénaires débarque.
Sans négociation possible, la sono du bar est rapidement réquisitionnée. Nous découvrons alors l'objet de leur impatience quand les premières notes "d'allumez le feu" résonnent. De "we are the champions" à Indochine ou encore "Janneton prend sa faucille" tout y passe. Les autres touristes étrangers venus se détendre devant une petite mousse assistent alors hallucinés à leur premier cours de culture musicale française (ce dernier dispensé en dansant sur les tables). Comme un bouquet final à cette soirée mémorable, alors que nous sommes en pleine partie de bière pong l'une des femmes du groupe s'approche.. Sa curiosité semble piquée au vif par notre jeu, mais, nous pensant anglais, la barrière de langue semble freiner ses ardeurs. Ce n'est donc qu'après un petit temps de réflexion qu'elle se risque à nous adresser avec son plus bel accent british la question suivante (qui je crois restera à jamais dans nos mémoires):
"Je voudwais commpwendwe?".
S'en suit alors une bonne heure de fou rire !
Enfin bref, non sans mal nous sommes arrivés le lendemain à Luang Prabang et avons repris la route dès le lendemain en direction de Nong Khyaw modeste bourgade située dans les montagnes brumeuses du Nord du Laos. Ayant demandé conseil à une agence de voyage française basée ici, nous partons le jour suivant pour un trek de 3 jours à travers la jungle Nord Laotienne. Sans doute l'une des plus belles randonnées de notre vie.
Accompagnés de Mr Big notre guide et de Ben et Simon (2 amis français) nous sillonons dans un premier temps les rizières et les champs de cultures. Ce n'est qu'au bout de 2 heures, qu'en slalommant à travers les sangsues, Malo glisse et s'ouvre la main dans les règles de l'art. Loin d'être inquiété, notre guide se met alors à machouiller des feuilles jusqu'à donner une pâte verte visqueuse que nous appliquons sur la plaie pour la cicatriser (plantes utilisée pendant la guerre du Vietnam pour arrêter les saignements dus aux balles). Une serviette hygiénique comme pansement et des tiges en guise de sparadrap et nous voilà repartis.
Mike Horn, euh pardon, notre guide a 28 ans et nous parle bien volontiers de la corruption qui règne dans son pays et des ravages encore visibles de la guerre du Vietnam, pourtant terminée en 1975..
Le soir nous séjournons chez l'habitant dans des petits villages qui ne connaissent que depuis quelques mois les joies de l'électrification. Pour le moment leurs habitudes n'en paraissent pas bouleversées pour autant. Pour preuve à la nuit tombée, des feux s'allument aux quatres coins du villages et les gens s'y réunissent.
Le temps de 2 nuits nous expérimentons la vie locale dans ce qu'elle a de plus simple et rudimentaire mais tellement humaine. Seul les plus pauvres sont restés au village. Les autres ont fui des conditions difficiles attirés par les promesses alléchantes des eldorados urbains. Nous nous exerçons à la pêche au filet, partageons le repas (et le whisky local à base de riz) auprès du feu dans leurs demeures de bambou et nous essayons au lavage du corps au jet d'eau.
La journée, nous avalons les kilomètres, sacs sur le dos, à travers des paysages à l'horizon infinis que même la plus belle des photos ne pourrait retranscrire dans les moindres détails.
Nos sourires s'élargissent, nos jambes se fatiguent et la plaie de Malo se cicatrise miraculeusement vite.. Malheureusement, l'aventure touche à sa fin.
C'est donc au bout de 3 jours que nous quittons notre guide et nos amis normands. La poignée de main est franche, les sourires sincères. Ces trois jours là, on est pas prêts de les oublier..