Dimanche 2 février, cette fois c’est la bonne. Il y a peu de chances d’ailleurs d’être amené à godiller. Si nous voulions partir hier, c’est bien parce que la navigation d’aujourd’hui s’annonce sportive voire rocambolesque ! Ce matin, nous préparons intelligemment le bateau et installons le solent, un foc de taille intermédiaire entre celles du génois et du tourmentin.
1 quart d’heure suffit à quitter la Ria de Vigo. Aussitôt, nous devons jongler rigoureusement avec les éléments. Nous nous éloignons du vent plein nord de force 5 à 7 BF en tournant à gauche direction plein sud. La houle est heureusement longue ce qui compense sa grande taille de 3.50m. 2h après notre départ, nous passons la frontière Portugaise ! Hallelujah 👐🥰🥳 Dans mon imagination, je voyais ces côtes comme étant semblables au littoral des Landes. Un peu sinistre par la force des vagues venant s’écraser brutalement sur les longues plages et creusant le sable sous l’action des ressacs. En amont, un relief le plus souvent vierge de toutes végétations substituées de longues et hautes dunes. Et j’avais vu juste. Enfin, à peu de choses près ! Effectivement, toutes les 10/15 bornes, elles sont remplacées par des habitations Playmonbil 🏢🧑🔧. Cela m'apparaît comme tel depuis le large.. Je vais essayer de modérer mes propos et attendre d’en voir plus pour émettre tous autres critiques sur l’urbanisation portugaise 😇.
Nous traçons une ligne droite à distance des côtes entre les lignes des 20 à 50 mètres, une mesure de sécurité inviolable ! La descente s’apparente grandement à la navigation entre Muros et Ribeira. À la différence près mais pas anodine que nous la faisons de jour. Le plan d’eau est scabreux, l’allure vent arrière (auquel nous sommes décidément abonnés) nous oblige à mettre les voiles en ciseaux. Je garde mon calme mais je dois bien reconnaître que je suis tendue comme un string ! Tenir la barre est tantôt amusant, tantôt inquiétant. Nos yeux s’arrêtent régulièrement sur le GPS affichant la vitesse en temps réel. Au fur et à mesure que nous avançons, nous explosons les records. Les 13 nds ne sont désormais plus qu’un lointain souvenir. Une première vague nous fait surfer jusqu’à 14 nds ! Une deuxième, quelques minutes plus tard, nous pousse jusqu’à 17 nds !😨. Jamais nous aurions osé concevoir une telle chose.Une sensation qui n’a rien à voir avec celle ressentie en voiture mais approximativement, il s’agit d’un 30km/h !! Je n’en reviens pas car c’est déjà une limitation de vitesse sur la route 🤣. Elle me rappelle les parcs d'attractions sur les rollercoaster ou les grands 8. Ou encore, les sessions déjà éprouvées sur les pistes de ski. Engagée sur une pente à vive allure, la vitesse ralentit petit à petit que je monte la bosse qui suit. Cachée, sur son flanc opposé : surprise ! C’est une descente quasiment verticale. 2, 3 secondes d’immobilité durant lesquels le cœur s’arrête de battre et youuuuuuuhhhh ⛷️ Voilà les guilis dans le ventre et le shoot intense d’adrénalines 🥴
Nous sommes stupéfaits voir décontenancés par ce qui vient de se produire ! Marvin se régale et savoure sans pondération ce moment. De mon côté, je suis envahie de sentiments divers et variés, plus contradictoire les uns que les autres. Je crois la joie mélangée à la peur, l'effarement à celui de l'épâtement…À fortiori, je ne sais plus si c’est agréable ou désagréable. L’avenir me le dira lorsque j’en serai à me rappeler ce qui vient de se passer.Une chose est sûre, c’est que ce moment n’est pas sans m’alarmer sur le prochain qui se dessine bientôt devant nos yeux. Marvin est plutôt confiant. Cela ne m’étonne guère et pourtant… Le môle de Viana do Castelo, comme son nom l’indique, est un ouvrage formé d’un amas de roches entassées pouvant être maçonnées et destiné à protéger l’entrée du port. Je ne suis pas si sotte que ça et même si mon accoutrement ainsi que mon comportement peuvent figurer du contraire, je vois bien le danger se matérialiser devant nous. Le mur de roches bétonnées remplit très bien son rôle en faisant extraordinairement bien obstacle à la houle. Dans le prolongement de la digue, la remontée des fonds à l’effet de démultiplier sa taille déjà énoooorme 😱 Marvin à la barre choque l’écoute et la drisse du foc. Moi à l’avant du bateau, je m’affaire à l’affaler alors qu’il me résiste. Entrant dans le chenal et afin d’éviter de prendre la direction de la plage, nous sommes contraints de le faire sous une allure de près. Dommage, car c’est bien plus facile par vent arrière ou grand large, ceci facilitant la dévente de cette voile d’avant.Abasourdis mais rassurés, nous nous dirigeons maintenant sous grand-voile seule vers notre plate-forme flottante. Située sur la rive nord de la rivière Lima, nous préférons cet insolite ponton visiteur à tous les autres se trouvant dans le port derrière le pont-levis. Plus éloigné de la ville et plus ouvert sur la nature, nous nous octroyons par la même occasion, le plaisir d’en jouir intégralement et exclusivement. Effectivement, aucun bateau comme voisinage et pour seule compagnie, des mouettes et des goélands 👌. Plus tard malheureusement, nous réalisons que nous sommes sur l’air de jeu des bateaux de pêche (si je peux l’exprimer ainsi). Leurs passages créent des nuisances sonores et de grossières ondes sous notre coque 👎. Par ailleurs, nous nous trouvons en contrebas du remblais. Visiblement, nous sommes alors les acteurs d’un spectacle inhabituel. Tels des animaux, en liberté toutefois, dans un parc d’attraction 🐳. Nous faisons abstraction du vas et viens des piétons. Du moins nous essayons ! Car vaquer à ses occupations dans un décor fluvial qui, en toutes cohérences et toutes conséquences attirent les regards pour les joies de la contemplation, cela n’est pas chose aisée 😂 Bidouiller le bateau reste une activité simple à réaliser devant tout le monde. En revanche, faire sa vaisselle ou ses postures de yoga favorites relèvent d’un courage supérieur ! La posture de la charrue ou celle du cœur aimant par exemple, peut ressembler ici à un acte d’exhibition 👀 Enfin bon bref ! C’est un exercice intéressant pour se sentir libre en toutes circonstances de répondre à ses besoins. À force, on s’y fait et on oublie ce qui se passe autour ! Qui sait d’ailleurs, si cela peut faire rire ou sourire, nous ne voyons pas de mal à ça, bien au contraire, nous serions heureux d’avoir été source de gaîté dans la vie des gens ! Certains parfois nous saluent, sont curieux, cherchent le contact ou des réponses à leurs questions. Nous entrons volontiers dans l’échange même interrompu dans le grand nettoyage extérieur de Yes Aï (Ceci est vrai pour Marvin, ça l’est moins pour moi qui n’arrive certes pas à décrocher de ma besogne ! Quand je suis lancée sur une tâche, ma focalisation d’un certain point de vue est un peu trop.. comment dire … accentuer .. 😬)
5 jours s’écoulent à Viana Do Castelo. Hormis donc les nuits agitées par le travail des pêcheurs, nous passons du très bon temps ici, sur notre première escale portugaise. Un jour, nous nous laissons aller à une vie rêvée de patachon. L’autre, nous déployons nos forces pour arpenter digues et trottoirs, ponts et passages souterrains, chemins et plages.
Mercredi 5 février, nous enfilons nos maillots de bain et nous jetons follement dans l’océan. Cette eau à 14°C, que nous effleurons tous les jours et dans laquelle l’immersion complète manquait considérablement à nos corps. Plus que jamais, après 3 mois sans, nous comprenons Ô combien ce contact direct peut-être vivifiant, revitalisant, purifiant. Glisser en sa surface par le moyen d’un voilier ne suffit donc pas à satisfaire ce besoin de reliance. C’est une renaissance que nous ne tarderons pas à satisfaire de nouveau. On s’en fait la promesse : Nous ne passerons plus 1 mois ni même 1 semaine sans contacter cette source d’allégresse à portée de main.