Vendredi 09 novembre : on décide de partir lundi au mieux sinon mardi bien que le problème de moteur ne soit pas résolu.
Lundi 11 novembre : commémoration de la fin de la 1ère guerre mondiale et début pour l'équipage Yes Aï d'un long voyage en mer vers des territoires inconnus ! Un jour férié donc, ça n'est pas gagné…. Bien sûr le bureau du port est fermé, personne ne travaille or sans propulsion mécanique, il nous faut absolument un remorquage pour sortir de notre emplacement et ensuite de la rivière de Morlaix. Un mot à la capitainerie que nous avons collé à la porte la vieille a engagé ce matin quelques conversations sur les quais. C'est bien sur les pontons que vous trouverez autant que faire se peut, convivialité et entraide ! Une fois de plus, nous en avons la preuve. Caro et Patrice, nos voisins du ponton d'en face, se proposent spontanément de jouer les remorqueurs pour nous. 1 heure plus tard, c’est-à-dire à 12h05 pétante, 2 amarres virevoltent dans les airs annonçant irrémédiablement le début de notre périple. Une pointe avant puis une pointe arrière et voilà que deux bateaux n'en forment plus qu'un. Deux monocoques à couple et voici un catamaran depuis l'angle de vue des profondeurs. Yes Aï et Bella Ciao sont désormais mari et femme au moins pour une durée d' 1 heure en comptant l'attente à l'écluse et la marche nuptiale dans la remontée de la rivière.Dès lors, que notre boat est livré à lui-même, notre patience est mise à l'épreuve. Au lieu de s'élancer fièrement et franchement sur les flots, c'est dans la pétole (absence totale de vent) que nous commençons notre avancée. Si nous pouvons encore le dire ainsi ... ! En aval du Dourduff, nous jetons même l'ancre pour y attendre le petit vent qui permettra à Yes Aï de déployer ses ailes. Pas plus d'1/2 heure plus tard, le capitaine sort de l'habitacle et déclare apercevoir de petites rides à la surface de l'eau. Signe qu'une légère brise s'est levée. Signe que notre bateau va pouvoir montrer ce qu'il a dans le ventre après 2 mois et demi à croupir dans l'eau douce de Morlaix. Par chance, il est léger, nerveux et efficient. Un rien l'éveil et lui permet de se propulser.
Les conditions météorologiques ne sont pas celles annoncées. Nous nous attendions notamment à un ciel dégagé avec un vent de "nordé" (Nord-Est), idéalement ce dont nous avons besoin pour tranquillement faire route vers l'Aber Wrac'h. Au lieu de ça, nous recevons un cortège d'un célèbre crachin breton avec un vent du secteur Nord, nous contraignant à tirer bon nombre de bords pour sortir de la baie et de ses chenaux semés d'embûches. Un slalom impérieux entre les casiers de pêches, les perches, les tourelles et les bouées. Sans oublier l'île Louet et le remarquable château du Taureau qu'il est difficile en ce qui les concerne de ne pas éviter ! Ces circonstances imprévisibles rendant plus difficile la navigation s'ajoutent à celles que nous connaissons déjà, ce, dès l'instant où nous avons décidé de partir ce lundi :
Sans parler de l'arrivée de nuit planifiée selon courants et marrés sur les coups de 22h/22h30 ,il y a ce défaut de moteur. Moteur qui, au-delà d'être un plan B, joue un rôle d'anesthésiant à nos accès de doutes et de peurs. Émotions qui fort est de constater prennent finalement naissance dans l'habitude que nous avons de naviguer avec (même à l'état de dormance) !! Qui plus est, nos dernières longues navigations remontent à 2 mois et demi pour le capitaine Obi wan et près d'1 an et demi en ce qui concerne la matelote Anakin ! Une entrée en matière assez audacieuse me diriez-vous. Il n'empêche que c'est de cette façon que "traditionnellement" (visiblement) tous deux, nous reprenons nos activités et que jusque là, ça n'a été que bonheur et réussite ! Une introduction sportive et préparatoire, en somme toutes, de quoi être parés à nous mesurer à plus grand que nous. De mon côté et plausiblement pour celui de notre mousse Choubaka (à en juger son comportement),ce retour à l'état de flottaison engendre un léger mal de mer. Alors que de jolies voir de gracieuses chansons résonnent gaiement dans le cockpit, quelques éclats de rôts viennent malencontreusement hacher la continuité du son... Rien d'alarmant néanmoins car c'est dans des éclats de rire que nous vivons ce moment tant attendu. Ce moment rendu magique par un ciel ENFIN dégagé et lumineux, éclairé d'une généreuse demi-lune. Il est fascinant d'observer et de s'attarder sur la précise démarcation du beau temps et du mauvais temps dessinée par l'arrivée de l'anticyclone qui d'une vitesse spectaculaire repousse les nuages. Malgré 2 estomacs en vrac, nous accostons finalement sain et sauf le ponton visiteur de l'Aber Wrac'h.Un peu d'ordre à bord, petit casse-croûte frugal et hop, au lit !