Rien ne sert de courir, il faut partir à point .. Et tout vient à point à qui sait attendre !
Jour d'accalmie = jour de navigation !C’est à 9h30 ce mercredi 21 novembre que nous quittons le port de Brest. Et la sortie commence par une mise en mouvement plutôt insolite. Pour une sortie du port “au vent” du bateau, c’est-à-dire face au vent, il faut inévitablement hisser la grand voile. (Sous le vent, il suffit de dérouler le génois). Pour se faire, nous devons ré-amarrer le bateau de façon à lui faire faire un demi-tour sur lui-même. La manœuvre assez loufoque ressemble à une promenade de Yes Aï tenue en laisse !Rapidement, nous nous retrouvons vent arrière alors pour plus d'efficacité, nous installons le spinnaker. Il s’agit d’une immense voile très légère et fine fixée à l'avant du bateau, destinée à régler ses allures portantes. C’est toujours un régale de sortir le “spi”. D’une part, il embellit notre oiseau des mers, augmentant considérablement son envergure et lui ajoutant une note de fantaisie par sa couleur bleu. D’autre part, il offre une manière de naviguer complètement différente nous rappelant les sensations du surf et réveillant intarissablement nos âmes d’enfant. Le nôtre grand de 67m² nous fait gagner en vitesse le temps de sortir du Goulet de Brest et avant de faire cap vers la sublime Pointe du Toulinguet 😻 À sa hauteur, le soleil se cache un peu mais sa lumière est toujours resplendissante sur la surface de l’eau. Elle éclaire pareillement cette côte déchiquetée d’une beauté surnaturelle. Nous reconnaissons le phare, le sémaphore et enfin la plage de Pen Hat que nous avons déjà surfé plusieurs fois. Depuis la mer, il est vrai que nous apercevons des formations géologiques impossibles à voir depuis la terre. C'est le cas par exemple de ces immenses grottes dont l’une me fait penser curieusement à un asticot doté d'une bouche géante. Ou encore ces quelques criques bien cachées que l’on ne remarque pas depuis le sentier côtier tant la hauteur des falaises est titanesque. Depuis la mer, nous approchons certains rochers surprenant par leurs tailles de loin inestimables ainsi que par leurs formes plus saugrenues les unes que les autres. L’un d’eux révèle un profil poupin surmonté d’un reconnaissable petit nez en trompette. À une moyenne de 4 nds, nous avançons ensuite vers la Pointe de Pen Hir également d’une beauté incomparable nous devons le dire ! Ces paysages splendides compensent une navigation inconfortable sur une houle chahutée conséquence des coups de vent passés. Un véritable joyau de la nature, la Presqu’île de Crozon est une scène de débâcle où les éléments se rencontrent souvent d’une manière effrénée, rarement d’une manière calme et flegmatique. Néanmoins, ce sont dans ces lieux que nous avons chaque fois trouvé : jeux (surf et randonnée) et une impression délicieuse de “vacances” quand bien même nous y venions pour 2 jours.Passé la plage de la Palue, nous franchissons maintenant le Cap de la Chèvre (Beg Penn Ar Roz en breton) et tout de suite le rythme change. Yes Aï glisse de nouveau comme des skis sur la neige. Il ne lutte plus mais danse sur les vagues, l'envoyant tout droit vers le port de Morgat, notre dernier choix. Nous y restons 2 jours et 2 nuits le temps que la tempête Caetano passe pensant que nous serions suffisamment préservés des vents tempétueux d’ouest. En définitive, la nuit du mercredi à jeudi n’a pas été de tout repos. Certaines pointes atteignant 147 km/h ont fait gîter notre bon vieux Yes Aï quand bien même nous l’avions minutieusement amarré au ponton pour recevoir ces bourrasques. Réveillés une première fois à 00h et une deuxième fois à 4h du matin, il était déjà miraculeux que nous soyons parvenu à trouver le sommeil. Entre les claquements des drisses, les frottements des amarres, le sifflement des mâts, le clapot des vagues et le grincement des “pares-bats” sur la coque, ce fut un tintamarre ahurissant. Ces derniers se faisaient la malle et il fallut plusieurs fois les shooter au pied pour les remettre à leurs places. La sécurité du bateau en dépendait !C’est le lendemain en milieu d’après-midi que le calme revient. Nous en profitons pour nous offrir une balade dans le très joli bois du Kador jusqu’à son phare. Notre mousse à 4 pattes ne s’est pas fait prier et comme à ses habitudes, à la détonation du mot “balade”, l'excitation monte : Éternuements, gueule ouverte, roulades avant, roulades arrière, chien tête en haut et chien tête en bas (véritable postures de yoga !) gémissements… Celle-ci sait se faire comprendre ! La vie de vagabond ne convient pas à tout le monde, en ce qui nous concerne Marvin et moi, elle “fit”merveilleusement bien à nos recherches d’aventures. C’est aussi le cas lorsque nous avons d’autres choix que de nous arrêter. Nous profitons alors des tempêtes pour nous blottir dans notre maison flottante et vaquer à des occupations plus reposantes. Lecture, massages, écriture, musique …Vendredi 22 novembre, la météo est décidément bien capricieuse ces derniers temps et une nouvelle dépression est annoncée, “la tempête Bert”. En proie à des vents forts, de grosses rafales sont attendues en Bretagne en fin de journée. Juste le temps qui nous faut pour revêtir nos costumes de marin et regagner une nouvelle destination. Tréboul, un ancien port de pêche entouré de falaises, bordé par la rivière de Pouldavid et fermé par l'île Tristan. La commune attachée à celle de Douarnenez est située dans une petite anse normalement atteignable en 2 à 3 heures. Celle-ci devrait nous protéger le temps qu’il faudra. Après un départ un peu fastidieux sous une généreuse giboulée, nous traversons la baie de Douarnenez sans encombres accompagnés là encore d’un soleil radieux. Nous y exposons nos visages et faisons peau neuve en séchant nos parkas assis, bien calés sur les passes avant tribord du bateau. Le pilote auto en marche, nous réchauffons nos corps et nos cœur également en sirotant un savoureux lait d’or, concocté par le capitaine à bord, aussi le commis de cuisine, Marvin. Il en faut pas plus pour renouer avec nos sensations de liberté et notre jouvance seulement endormis jusque là. Alors que partout autour, la pluie semble frapper, il nous semble avoir le privilège de jouir de la mer désormais au sec et d’y rencontrer en outre, 3 petits dauphins en chasse. Sans surprise maintenant, nous performons indéniablement à l’arrivée. Notre précision dans l’ajustement des voiles nous engage proprement dans l’entrée du port et jusqu'au ponton. Chaque fois que nous gagnons un port, il faut savoir que nous gagnons la possibilité de se brancher ! Ce soir nous nous accaparons donc d’une cinquième borne d'électricité, de quoi trouver encore un peu de confort, de quoi soudoyer notre soufflant de salle de bain d’envahir l’habitacle d’une douce chaleur alors bien mérité !