L'air est chaud, le sac est lourd. Le minibus m'a déposée à 2 pas de l'auberge de jeunesse où j'ai réservé. Les choses s'annoncent bien. D'un seul coup le temps change un orage violent s'abat sur Erevan. Deux jeunes femmes m'invitent à me mettre à l'abri dans leur boutique. C'est une galerie d'art. Les choses s'annoncent toujours bien.
Zyar est Kurde Irakien. Après une année obligatoire dans l'armée a l'âge de 17ans ( il en garde un souvenir cauchemardesque), il a pu se rendre en Angleterre pour commencer des études de médecine (il préfère réparer les gens que les casser). Il continue ses études à Erevan, je suppose pour des raisons financières, ou il commence sa 2ème année. Il a 19 ans. Il avait un appartement, mais pour les raisons évoquées plus loin, il ne peut plus payer un loyer. C'est compliqué de travailler dans un espace collectif.
Je pensais louer une chambre. ou un petit studio. Les conséquences de la guerre font que les prix sont prohibitifs. Les réfugiés sont arrivés en masse à Erevan du Haut Karabakh . Je ne trouverais rien à moins de 400 euros. Au Loft Host j'ai payé 8 euros la nuit la première semaine et, depuis que je suis installée pour plus longtemps, 5 euros. Un gros avantage, je suis en plein centre ville et peux aller partout à pied.
En attendant l'arrivée des responsables avec lesquels je veux prendre rendez-vous, on m'offre un petit café. Encore une fois, l'affaire semble bien s'engager. Elle va vraiment prendre tournure avec l'arrivée de Marine responsable des affaires internationales. Elle est emballée par le projet et passe sans plus attendre à l'action. Dans l'heure qui suit, elle m'a présentée aux enseignants, à la direction, à l'administration, aux étudiants... Marine parle couramment français et a visiblement un grand talent pour convaincre un public pas tout à fait acquis (l'histoire des moutons, ça fait sourire). Ces longs échanges en arméniens me ravissent, car lorsque l'on ne saisit pas les mots, on se concentre sur les expressions des visages qui deviennent la seule grille de lecture, et puis je suis assise dans des fauteuils très confortables, dans des bureaux immenses dont les murs sont tapissés de peintures. J'ai presque l'impression d'être un personnage important.
Etiennette veut me faire partager un de ses plaisirs favoris :partir au volant de sa Lada pour un road trip en Arménie. Le plan : Direction Nord-ouest pour se rendre chez une copine qui vient d'emménager dans une ville très intéressante à visiter, Gyumri. C'est à 2h30 d'Erevan. Le plan chez la copine a foiré, la Lada a foiré, du coup le plan a changé (nous sommes toutes les deux souples et adaptables et le passage en force n'est pas dans notre philosophie de vie.) Après une fin de soirée pluvieuse, le soleil s'est levé sur un ciel lumineux, c'était le temps idéal pour rouler vers le sud du côté de la frontière turque et se rendre au monastère de Khor Virap en face du mont Ararat. La Lada dépannée , grâce aux pinces d'un automobiliste prévoyant, nous avons pris la direction du sud. Etiennette et Rainette de vraies girouettes.
avons repris cols et vallées dans la nuit noire ou aucune pollution visuelle n'ait venu brouiller l'obscurité. Nous sommes passées discrètement, un peu à tâtons, car les phares de la Lada ne sont pas très performants. Ils n'ont pas ébloui le petit renard qui a pris le risque de traverser la route.