Alta la Samie

Publiée le 06/07/2022
Décidément, toutes les villes du Grand Nord nous réservent des surprises profondes. Alta, la dernière que nous visitons, nous a vivement touchés. Mais voyez vous-mêmes.

Deux jours au cœur des terres Samies

Alta est la dernière ville de notre voyage, avant les hauts-plateaux qui nous conduiront vers l’ultime étape.

Cette ville est aussi la capitale du Finnmark, région la plus septentrionale de Norvège. Elle est au cœur du pays sami. Les Samis sont le seul peuple premier reconnu comme tel en Europe.

C’est donc tout naturellement que nous allons vous parler des Samis (que nous ne connaissions pas du tout avant notre voyage), avant d’évoquer pour finir la très belle « cathédrale des aurores boréales ».

Mais au moment de vous présenter les Samis, nous vous proposons d’écouter en même temps cette chanson de. Marie Boine, chanteuse et conteuse Sami aujourd’hui internationalement connue.

Le peuple Sami est sans doute arrivé des environs de la Mongolie…
Le peuple Sami est sans doute arrivé des environs de la Mongolie…
… il y a plus de 6000 ans. Et les gravures qui ont été retrouvées dans la baie d’Alta, qui sont datées de cette époque, sont l’expression de leur existence très ancienne. On voit ici l’organisation sophistiquée d’une chasse aux rennes. Les rennes sont poussés par des bateaux vers la rive d’une rivière représentée par la faille du rocher (les rennes nagent très bien). Et sur la rive des fosses creusées recouvertes de branchages les attendent. Les préhistoriens se demandent si ce qu’un homme, dans un des bateaux, porte au-dessus de sa tête est un objet religieux ou plus simplement un objet pour effrayer les rennes.
On voit par la représentation des enclos que très tôt ils ont domestiqué quelques rennes.
On voit par la représentation des enclos que très tôt ils ont domestiqué quelques rennes.
L’UNESCO a classé ces gravures sur roche au patrimoine mondial de l’humanité.
On voit aussi qu’ils pratiquaient la pêche en mer.
On voit aussi qu’ils pratiquaient la pêche en mer.
Toutes ces gravures à même la roche sont visibles en extérieur. La peinture rouge est contemporaine, pour que les néophytes que nous sommes puissent voir les dessins distinctement.
Territoire du peuple Sami
Territoire du peuple Sami
Le territoire des Samis s’étendait sur 4 pays, indépendamment des frontières. Leur histoire est emblématique de l’évolution de notre société et de notre planète.
Un lien étroit avec la nature
Un lien étroit avec la nature
Le mode de vie des Samis est étroitement lié aux rennes qui leur ont fourni les moyens de subsistance pendant plusieurs siècles : peuple nomade, ils suivaient les troupeaux de rennes sauvages lors de leur transhumance au début de l’été, vers la côte et à l’automne, vers l’intérieur des terres.
Les rennes leur fournissaient nourriture, habillage, outils et monnaie d’échange.
Les rennes leur fournissaient nourriture, habillage, outils et monnaie d’échange.
Les conditions de vie étaient très difficiles, en raison en particulier des conditions météorologiques et de la longue nuit polaire.
La religion avait une grande importance dans la vie des Samis
La religion avait une grande importance dans la vie des Samis
Animistes, ils avaient de nombreux dieux et vénéraient en particulier la nature et les animaux. Ces croyances conduisaient leur comportement au quotidien : respect de la nature, chasse raisonnée en particulier.

Au fil des siècles, les samis ont été victimes de multiples attaques : la présence sur leur territoire de ressources telles que le bois, l’argent, le cuivre, le pétrole, le gaz a conduit les gouvernements norvégiens et suédois à investir les zones d’élevage des rennes pour en tirer profit, sans aucune attention pour le peuple Sami qui a souvent perdu son moyen de subsistance.

Par exemple au XIXe siècle, ils ont été forcés pour un salaire très faible à travailler au transport du minerai en utilisant les rennes qui mourraient massivement. S’ils refusaient, ils étaient brutalisés, voire quelques-uns assassinés pour l’exemple, de manière analogue à ce qui se passe aujourd’hui en Amazonie.

L’assimilation des Samis
L’assimilation des Samis
A son départ à l’automne 1944, l’armée allemande a pratiqué la politique de la terre brûlée sur ordre de Hitler, en particulier dans le nord de la Scandinavie. Lors de la reconstruction, la Norvège décide d’intégrer les régions same à la société norvégienne en leur proposant des logements et un mode de vie censés leur apporter une vie meilleure. Cela conduit à la perte des repères culturels pour la nouvelle génération : habitat, coutumes, connaissance de la nature, langue, etc… Il était interdit de parler la langue samie dans la vie sociale.

L’intrusion de la vie norvégienne moderne a aussi apporté des changements importants dans le mode de vie des Samis : scooters des neiges, GPS. Ces technologies ont apporté confort et sécurité, mais leur coût a obligé les éleveurs Same à augmenter la taille de leur cheptel, entrant ainsi dans la spirale du néolibéralisme où l’augmentation de la production et de la rentabilité sont obsédantes. 

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Vers la reconnaissance du peuple sami
Vers la reconnaissance du peuple sami
En 1956, un « comité Sami » est créé qui revendique le droit des enfants samis à recevoir une éducation initiale dans leur langue maternelle.
Au cours des années qui suivent, les Samis interviennent dans les débats politiques.
Au cours des années qui suivent, les Samis interviennent dans les débats politiques.
L’affaire du barrage d’Alta en 1979 est l’exemple le plus célèbre : les Samis se sont opposés avec force au projet de construction d’un barrage qui allait détruire de grandes zones de pâturage des rennes et constituer un désastre écologique. Le barrage a été finalement construit mais cet épisode a conduit à la création du parlement Sami en 1989
1989 : création du parlement Sami
1989 : création du parlement Sami
Étape décisive dans la reconnaissance des droits des Samis, même si ce parlement n’a encore aujourd’hui qu’un pouvoir consultatif. Ici le roi de Norvège inaugure le parlement avec le représentant du peuple sami.
Le peuple Sami aujourd’hui
Le peuple Sami aujourd’hui
De nos jours, la culture sami est reconnue et transmise
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Les Samis utilisent les moyens les plus modernes …
Les Samis utilisent les moyens les plus modernes …
pour la gestion des troupeaux. La viande de renne est exportée partout dans le monde, mais il n’y a plus de rennes sauvages …

Mais les relations entre les Samis et les autres Norvégiens restent compliquées : les conflits persistent à propos des zones de pâturage des rennes et le racisme s’exprime plus ou moins ouvertement dans les discours d’un certain nombre de Norvégiens. 

Laissons cependant, avec l’œuvre de cet enfant Sami, le dernier mot à l’espoir.
Laissons cependant, avec l’œuvre de cet enfant Sami, le dernier mot à l’espoir.
Il se nomme Line Sem Henriksen.

Visite dans une sijdda samienne

La sijdda est l’unité de base de la population samie. C’est plus qu’une famille. C’est un clan ou une tribu. Donc un groupe de quelques familles réunies sous l’égide d’un chef et d’un conseil. Aujourd’hui, la majorité des 75 000 Samis vit… aux environs d’Oslo. C’est vous dire que la sijdda n’a plus la même signification qu’autrefois. C’est donc pour une bonne part une plongée dans le passé que nous avons faite ce lundi 4 juillet après-midi.

Mais pas seulement, car 10 % des Samis sont encore éleveurs de rennes et c’est surtout d’eux qu’il est question dans cet éco-musée.

Nomades, les Samis vivaient dans des tipis ou des yourtes.
Nomades, les Samis vivaient dans des tipis ou des yourtes.
Les conditions d’existence étaient extrêmement rustiques.
Les conditions d’existence étaient extrêmement rustiques.
Le renne, alors sauvage, était le centre de gravité de leur vie.
Le renne, alors sauvage, était le centre de gravité de leur vie.
Cela dit pour les Samis chasseurs de rennes. Dans leur hiérarchie sociale, être chasseur de rennes, c’était appartenir au haut du panier. Les autres, plus nombreux finalement, vivaient sur les côtes et étaient pêcheurs ou artisans.
Le renne était essentiel pour le vêtement.
Le renne était essentiel pour le vêtement.
Ici un manteau que l’on portait quand on surveillait longuement dans la neige les mouvements des rennes.
Un autre vêtement, de fête, dépourvu de la fourrure hyper chaude.
Un autre vêtement, de fête, dépourvu de la fourrure hyper chaude.
Sous-vêtement où le nom et l’appartenance familiale sont gravés.
Sous-vêtement où le nom et l’appartenance familiale sont gravés.
Jambe de pantalon en… peau de renne bien sûr !
Jambe de pantalon en… peau de renne bien sûr !
Chaussures en renne remplies d’herbe séchée spécialement préparée.
Chaussures en renne remplies d’herbe séchée spécialement préparée.
Cette herbe maintenait les pieds au chaud.
Berceau en cuir de renne.
Berceau en cuir de renne.
Il pouvait être traîné sur la neige ou flotter sur l’eau en fonction des besoins…
Bien sûr les Samis pratiquent le ski depuis très longtemps !
Bien sûr les Samis pratiquent le ski depuis très longtemps !
Vêtements de fête…
Vêtements de fête…
Ce devait être un sacré renne !!
Ce devait être un sacré renne !!
La machine à coudre a commencé à introduire la modernité au milieu du XXe siècle.
La machine à coudre a commencé à introduire la modernité au milieu du XXe siècle.
Pour les femmes la couture était un travail constant et extrêmement astreignant. Il fallait tailler et coudre 3 à 4 parures de vêtements d’hiver par personne pour tenir toute la saison dans une vie que beaucoup passaient essentiellement à l’extérieur et qui usait tout, le matériel comme les hommes.
À la fin de la visite, nous dégustons un délicieux plat de renne dans un grand tipi.
À la fin de la visite, nous dégustons un délicieux plat de renne dans un grand tipi.
Réellement délicieux.
Réellement délicieux.
Christine a fait une exception en cette occasion, et tous deux nous avons été impressionnés par la qualité des plats de viande cuisinés « à la Sami ».

Réconciliation du christianisme et de la nature : la cathédrale d’Alta.

On reproche au christianisme, reproche partiellement fondé, d’avoir négligé la nature et même d’avoir favorisé son exploitation aveugle. Ici, à Alta, la toute nouvelle cathédrale luthérienne a été officiellement baptisée « cathédrale des aurores boréales ». Et elle est théologiquement pensée dans un rapport aux éléments (ciel, lumière, horizon cosmique). Petite promenade…

D’abord vous remarquez la forme retenue : une spirale galactique…
D’abord vous remarquez la forme retenue : une spirale galactique…
… plutôt que la forme traditionnelle de la croix latine. La croix n’est pas absente, elle est apposée au-dessus de la porte d’entrée..
L’entrée a lieu en passant par la base circulaire du clocher.
L’entrée a lieu en passant par la base circulaire du clocher.
… qui ouvre sur la nef de manière assez saisissante.
À l’intérieur du clocher, une échelle de Jacob, lien entre le ciel et la terre.
À l’intérieur du clocher, une échelle de Jacob, lien entre le ciel et la terre.
…
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À l’intérieur de la nef, mais sur la tour du clocher, une stylisation des 12 apôtres.
À l’intérieur de la nef, mais sur la tour du clocher, une stylisation des 12 apôtres.
L’ouverture de l’espace du chœur évoque un mont.
L’ouverture de l’espace du chœur évoque un mont.
…. Les Évangiles parlent de la crucifixion de Jésus sur le mont Golgotha.
Un Christ crucifié d’une simplicité étonnante…
Un Christ crucifié d’une simplicité étonnante…
… Ils n’ont pas cherché à faire coïncider la figure du Christ avec la représentation que les chrétiens s’en sont faits depuis le sixième siècle environ et qui s’est imposée partout. Cela redonne une « actualité » à la signification de la crucifixion. Le poids et l’écran de l’histoire disparaissent pour remettre le spectateur devant l’acte lui-même.
…
…
Les bras tendus à l’extrême évoquent la souffrance ; et le visage tourné vers le ciel et baigné de la lumière bleutée qui tombe du puits de lumière rappelle l’évangile de Jean et une affirmation théologique majeure : « le Père et moi, nous sommes un ».
Le baptistère…
Le baptistère…
…. est porteur de plus de trente nuances de bleu…
…. est porteur de plus de trente nuances de bleu…
… rappelant une prière majeure des chrétiens contemporains, le « Notre Père », qui commence en soulignant que le Père est « aux cieux ».
Les orgues, plus classiques.
Les orgues, plus classiques.
Vraiment, cette cathédrale contemporaine…
Vraiment, cette cathédrale contemporaine…
… construite en 2013-2014, est un bel exemple de vitalité théologique et artistique. Et il est sans doute plus important de méditer le fait qu’elle soit là plutôt que de réfléchir sur le nombre de personnes qui se sentent interpellées.
Et chaque hiver, Alta et sa cathédrale sont magnifiées….
Et chaque hiver, Alta et sa cathédrale sont magnifiées….
… par d’envoûtantes aurores boréales.
… par d’envoûtantes aurores boréales.

Il est merveilleux que nous puissions éprouver le monde comme beauté.

Mais il nous faut retrouver comme l’oiseau la liberté des nomades.
Mais il nous faut retrouver comme l’oiseau la liberté des nomades.
Et après nous être reposés, requinqués et instruits.
Et après nous être reposés, requinqués et instruits.

Nous nous remettons en route pour l’avant dernière étape, celle des hauts-plateaux du nord d’Alta et le cheminement vers Honningsvåg où nous serons alors tout proche du Graal !

Et pour parvenir aux pieds de ce Graal, figurez-vous que nous avons, pensons-nous, trouvé un chemin original. Mais sommes-nous sûrs de notre fait ? À voir.

A bientôt donc.

5 commentaires

BBW

Grand merci Ghislain pour ce magnifique commentaire…..bonne continuation à tous deux.bisous.🤗😍

  • il y a 3 ans

BW

Merci Ghislain pour ce récit documenté ! On suit avec grand plaisir.

  • il y a 3 ans

paganini

Votre voyage arrive donc bientôt à son terme , j’en suis tout attristé pour vous ! Quel beau périple….et merci de nous le faire partager.
On se voit à votre retour ?
Bises

  • il y a 3 ans

GEB

Passionnant!!!! Merci!

  • il y a 3 ans

francoisejeanluc

Un grand merci pour ces reportages.
Je vous embrasse et vous souhaite une belle fin de voyage.
Françoise

  • il y a 2 ans
Christine et Ghislain
Samson
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