Après la forêt et la montagne, retour sur les plages des Caraïbes. Le moins que l'on puisse dire c'est qu'elles m'avaient manqué. Les eaux transparentes et chaudes, le sable blanc se glissant entre les orteils nus. Même si la pluie tente de gâcher la fête, elle en devient presque inexistante.
L'archipel de Bocas del Toro est un must-see au Panama. Un musée naturel à ciel ouvert. Les gens font même le déplacement depuis le Costa Rica pour les visiter, ce qui est suffisamment rare pour le souligner. Ses nombreuses îles rassemblent tout ce qu'un touriste peut rechercher dans un archipel : la fête, l'aventure, la solitude, et le calme. Pour ma part je laisse tomber le farniente pour le moment.
Je profite des jours humides pour partir en exploration. Beaucoup sont frileux de sortir sous la pluie, car les chemins sont très durs d'accès, se transformant en une boue épaisse remplissant les chaussures. Mais ce n'est pas ça qui va m'arrêter. Sur l'île de Bastimiento, je m'aventure seul à la découverte des plages. Je quitte le village de pêcheur pour m'enfoncer dans la jungle dans les hauteurs. L'odeur de la nature après la pluie se mélange au bruissement des arbres et des animaux. La solitude.
Après quelques glissades plus ou moins contrôlées, et m'être trompé plusieurs fois de route, je tombe enfin sur la Playa Wizard. Personne à droite, personne à gauche. Des kilomètres de plage pour moi tout seul. Même les bateaux de touristes ne peuvent la rejoindre car la mer est trop agitée. Je suis le long de la côte à la recherche de la fameuse grenouille rouge, animal emblématique de l'île. Mais même ici, le plus perdu que je puisse être, je retrouve une quantité de plastique déconcertant. Et je ressens un profond dégoût en observant les plages recouvertes de bouteilles, de tongs, et même d'une télé !
J'escalade des récifs rocheux, marche au dessus d'un vieux pont en bois à l'abandon dont une latte sur trois tient encore et je tente de retrouver les pistes ouvertes à la machette par les gardes de l'île. Mais il est très dur de se retrouver dans cette végétation dense, d'autant que les sentiers sont effacés par la pluie. Être seul dans ces conditions me gâche un peu le plaisir de l'aventurier car même si il est plaisant de randonner de la sorte, je sais que le moindre faux pas peut me coûter cher. Alors je suis constamment sur mes gardes.
Lors d'une des nombreuses pauses que je réalise pour profiter de la vue, je ressens du mouvement dans un buisson voisin. Je me déplace discrètement tout en scrutant l'épaisse forêt et c'est à ce moment que je la vois. Une minuscule grenouille rouge sautant de feuille en feuille. Son corps est enduit d'un produit toxique et je prends bien soin de ne pas la toucher. Mais avoir la chance de la croiser est très rare car cette espèce est en danger et même ici il est dur de l'observer. Je l'observe fasciné et émerveillé, puis lui fais mes adieux avec respect et finis mon chemin jusqu'à la dernière plage de l'île.
Ici je retrouve quelques backpakers qui eux aussi ont quitté les foules de l'Isla Colon où je séjourne (ça ne s'invente pas...). Et je passe devant un groupe de jeune en train de nettoyer la plage. Je trouve l'action bénévole tellement cohérente avec ma journée que je laisse tomber mon sac pour les aider. Ce n'est pas grand chose mais en une heure on aura rempli plusieurs sacs poubelles tout en repartant avec le sentiment d'avoir un peu diminué notre propre impact de touriste sur cette nature belle et fragile.