Comme je l’avais expliqué après mon passage dans la ville de Québec, j’avais décidé de retourner à Montréal pour y travailler. Attendre que l’hiver passe afin de profiter au maximum des endroits visités, tout en essayant de ne pas piocher dans mes économies durant cette période, voire essayer de gagner un peu d’argent pour pallier aux dépenses du premier mois.
Au Canada, le salaire minimum dépend de la province et parfois de la catégorie du métier choisi, de l’expérience, voire même de l’âge de l'employé. Par exemple, au Québec, le salaire horaire minimum est actuellement de 10,75$ de l’heure pour les salariés « non spécialisés » et de 9,90$ pour les salariés dits « au pourboire ». En euros (et après prélèvement de l’impôt à la source), cela représente un peu moins de 7€ de l’heure dans le premier cas.
Après avoir totalement refait mon CV, en français et en anglais, j’ai passé deux ou trois jours à arpenter les principales rues commerçantes de Montréal afin de le distribuer au maximum. Je me suis essentiellement focalisé sur les métiers du service et de la restauration (plongeur, serveur, barman, supermarchés, etc.). Bien que la saison soit peu propice au commerce, ces distributions m’ont permises d’obtenir quelques contacts et essais. Je me suis tout d’abord vu proposer un essai dans un petit supermarché de quartier, durant lequel j’ai… coupé des fruits ! Ceci aurait pu déboucher sur un travail de nuit, mais, payé autant (ou aussi peu) que la journée, j’ai décliné.
Après avoir laissé mon CV dans une société de développement web, croisée au hasard d’une rue (je n’ai pas résisté…), il m’a ensuite été proposé de participer à une vente aux enchères d’œuvres d’art. Une mission des plus ardues et intellectuelle m’a été confiée : pour chaque enchère, prendre note du numéro du lot et de l’acquéreur (notes devant servir à la vérification des comptes à l’issue de la vente). Il n’y a pas de sot métier ! Bon, j’ai aussi participé au rangement et à l’emballage des tableaux. Un poil plus intéressant. Et ce fut surtout 80$ gagnés assez facilement.
C’est finalement chez Fairmount Bagel, la plus ancienne boulangerie de bagels de Montréal, que j’ai travaillé durant un mois. A mon arrivé au Canada, j’avais lu que ce lieu était un incontournable de la ville. M’y rendant initialement pour y goûter leurs fameux bagels, j’en ai profité pour demander s’ils recrutaient. Après un échange d’une dizaine de minutes – en anglais – avec le manager, il m’a été demandé de me présenter deux jours plus tard, à 8h00 (il n’a même pas voulu regarder et encore moins garder mon CV le bougre !). Vient, et on verra ce que tu vaux !
D'après l'histoire officielle, la boulangerie Fairmount Bagel a été fondée en 1919 par Isadore Shlafman, immigrant russe. La boutique tient son nom de la rue Fairmount où elle se situe.
Aujourd'hui celle-ci est réputée à travers le monde L'on peut régulièrement y voir, devant l'entrée, une interminable queue d'habitués et de curieux désireux de goûter aux fameux bagels (même en hiver !).
À mon arrivée le lundi matin, inutile de préciser que je n’y connaissais strictement rien à la boulangerie. On m’a tout d’abord confié MA veste, un balai et la tâche de… balayer. Je voulais un travail manuel, j’ai frappé à la bonne porte.
Après deux jours à balayer, nettoyer, ranger et préparer d’immenses pâtes dans de gros mixeurs, j’ai commencé à apprendre l’art de la confection du bagel, façon Montréal. Et ce ne fut pas une mince affaire !
Les premiers bagels ont été confectionnés au début du XVIIe siècle, par des communautés juives d'Europe de l'est. Ils ont ensuite été importés à New York puis à Montréal, au début du XXe siècle, par ces mêmes communautés.
Aujourd'hui, un débat fait rage pour savoir qui de New York ou de Montréal possède les meilleurs bagels ! Les principales différences sont les suivantes :
À Montréal, la confection des bagels se déroule de la manière suivante :
Le boulanger doit donc gérer toutes ces tâches à la fois. Le plus compliqué étant de gérer en parallèle les deux types de cuisson (marmite et four). Bien que le travail du « baker » soit moins monotone que celui d’un « roller », je pense que le fait d’avoir énormément de choses à gérer simultanément en fait un poste bien plus complexe. Et… c’est celui que j’ai principalement occupé durant ce mois passé chez Fairmount Bagel ! Les premiers jours, le timing fut très difficile à gérer, les bagels n’étaient pas forcément ronds, souvent trop cuits, les brûlures aux mains et avant-bras fréquentes, etc. Mais, assez rapidement, j’ai pris le pli et ai même commencé à aimer cela, ce qui n’était pas forcément une bonne chose, à en croire mes collègues ! Le plus ancien de la maison m’a dit « Si tu commences à aimer travailler ici, c’est que c’est le moment de partir ! ». Ok. En réalité, j’avais déjà annoncé, assez rapidement, au manager, mon départ pour la mi-mars.
Au final, malgré les horaires assez compliquées (réveil à 4h45 pour commencer à 6h), le fait de travailler tous les weekends, le salaire pas forcément à la hauteur de la tâche, j’avais réellement commencé à apprécier travailler dans cette boulangerie, notamment pour la bonne ambiance qui y règne et parce qu’il était plaisant de voir son travail apprécié, par les autres collègues mais également par les clients. Une chose qui m’a également énormément plu est le fait de pouvoir discuter et partager, le plus souvent en anglais, avec des collègues venant des quatre coins du monde : Canada, bien sûr, mais également Sri Lanka, Afghanistan, Bénin, Éthiopie, Cameroun, Salvador, Jamaïque, Haïti. Et j’en oubli. Par contre, pas un seul breton à l’horizon ! Apparemment, très rares ont été les français à s’aventurer au-delà du comptoir de vente de la boutique.
Les festivaux (un festival, des festivaux !) sont un aspect important de la culture montréalaise. Le premier de l’année, l'Igloofest, s’est déroulé du 12 janvier au 19 février, sur l'un des quais du Vieux-Port de Montréal. Ce festival de musique électronique est à priori le seul festival majeur au monde à se dérouler en extérieur durant l'hiver, avec des températures pouvant quelquefois friser les -30°C. Il rassemble chaque année une centaine de millier de festivaliers, venus écouter des DJs locaux et internationaux.
Lorsque l'on fait du couchsurfing, l'on peut parfois tomber dans des endroits improbables ! Comme dans un immense loft en plein cœur de l'une des principales artères de Montréal. En plus de ressembler d'avantage à une galerie d'art urbain qu'à un logement, cet endroit bien caché se veut être « l'unique show d'humour bilingue hebdomadaire à Montréal ». Pour 5$, j'ai pu y voir à deux reprises des artistes débutants en rodage comme des artistes chevronnés, sortant tout juste de leur spectacle. Vraiment inattendu et hilarant (un peu moins quand j'avais du mal à suivre l'humour anglophone en fait) !
Les jours précédents mon départ de Montréal ont été relativement doux, ce qui a permis aux rues de se débarrasser de la quasi-totalité de leur neige. Pour ma part, cela m'a permis de découvrir tout un tas d’aménagements urbains, jusqu'alors invisibles car enfouis sous des centimètres de neige. Malheureusement, cela m'a également permis de me rendre compte à quel point la ville est sale en cette période…
Et le
pire est que le nettoyage des rues ne semble pas être une priorité pour la
ville : je n'ai jamais croisé le moindre balayeur et/ou la moindre laveuse. Peut-être parce que les autorités savaient que mi-mars allait avoir lieu la plus grosse tempête de neige de l'hiver, durant laquelle sont tombés, sans discontinuer, plus de 50 cm de flocons en 24 heures. Assez impressionnant et intéressant à vivre !
Enfin, pour ceux qui souhaitent des nouvelles de Petit-Pas : il se porte très bien et continue sa visite de la ville pendant que papa est au travail :)
« Le travail, c'est le refuge des gens qui n'ont rien de mieux à faire »
– Oscar Wilde