Nous laissons une partie de nos sacs au campement. C'est aujourd'hui l'ascension finale vers Ciudad Perdida. Seulement une heure et demi mais 1200 marches raides comme des échelles. C'est glissant et le palpitant est mis à rude épreuve. La récompense est au sommet.
Sur une crête largement dégagée, de grands cercles de pierres délimitaient l'emplacement de constructions, aujourd'hui disparues. Ici, au milieu d'une nuée de moustiques, pas de monuments ni de pyramides. Les archéologues peinent à déchiffrer l'histoire d'une civilisation sans écriture où seuls quelques pétroglyphes subsistent encore. Les interprétations sont hypothétiques. Les datations situent la construction de la ville entre 700 et 1600 après JC. Elle serait l’œuvre des Tayrona dont descendent les communautés locales.
Probablement capitale politique et culturelle, la Ciudad perdida dégage une impression de sérénité, elle semble posée sur la canopé. Forêts, montagnes et cascades sont comme des gardiens de cette cité perdue. On sait l'importance de la nature pour les kogis. Le site est fermé chaque mois de septembre pour évacuer les mauvaises ondes apportées par les petit frères. En l'occurrence nous, les touristes. Probablement déserté lors de l'arrivée des conquistadors, la cité a été phagocyté par la forêt. Jusqu'à ce qu'elle soit redécouverte en 1975 puis pillée par les guaqueros, les chasseurs de trésors. Dans les années 2000, seules une poignée de touristes s'aventurent dans cette zone hautement dangereux. Narcotrafiquants, guérilla, paramilitaires. Aujourd'hui, la Sierra Nevada a été pacifiée grâce, entre autre, a une forte présence militaires. Nous sommes loin du tourisme de masse mais le site voit tout de même défiler autour de 25000 marcheurs par ans. Avec ses impacts positifs et négatifs. C'est la difficile question du tourisme responsable.
Après 3 heures de découverte du site. Il nous faut prendre le chemin du retour. Descente acrobatique. Déjeuner au camp de paraiso puis retour sur le camp de Mamuke. Montées et descentes se succèdent au cours d'une marche rendue plus difficile par la fatigue accumulée ces derniers jours. Nous sommes à chaque fois émus lorsque nous croisons des Kogis ou des Wiwas. Tellement de questions sans réponses. Les hommes mâchent la feuille de coca et tiennent à la main leur poporo. Une calebasse dans laquelle se trouve une sorte de chaux, catalyseur de la cocaïne. La coca est ici un fort marqueur culturelle. Elle est sacrée, à la fois réducteur de fatigue, elle est aussi utilisé par les momas, guides spirituels et chefs de village, un un facilitateur dans les cérémonies chamaniques.
A la nuit tombée, tous les marcheurs se retrouvent au dîner. Une cantine des plus cosmopolite. Pour notre groupe Hollandais, Américain, Polonais, Colombiens. De quoi mettre à l'épreuve notre maîtrise légendaire des langues étrangères. Ce campement est aussi l'occasion d'être confronté à une image moins glorieuse des populations locales. Plantées derrière la cuisine, à mendier les restes de repas ou faisant le tour des tables pour quémander bonbons et bibelots. Nous sommes une nouvelle fois face à notre responsabilité de touriste. Chacun jugera.
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